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faire à son tour pousser jusqu’au ciel les acclamations dues au nouveau Constantin, au nouveau Théodose, au nouveau Marcien, au nouveau Charlemagne, et Dieu sait qu’elles ne lui ont pas manqué.

Cela n’a pas empêché l’empereur de dire plusieurs fois : « La plus grande faute de mon règne est d’avoir fait le concordat ; » mais il est à croire qu’en parlant ainsi il regrettait surtout de n’avoir pas stipulé des conditions qui limitassent le droit laissé à la cour de Rome de faire attendre l’institution canonique aux évêques désignés par lui, ou peut-être pensait-il que, dénuée d’une constitution légale, et devant tout à sa tolérance souveraine, l’église serait restée plus complètement dans sa main. En tout cas, il ne se reprochait point d’avoir donné aux pasteurs et à leurs ouailles trop peu de liberté. Les amis de l’indépendance des églises n’ont point à se prévaloir des regrets qui lui sont échappés : il ne s’est jamais repenti de n’avoir pas été assez libéral ; mais il demeure vrai qu’ayant, par le concordat, commencé à traiter la religion en affaire d’état, ce premier pas l’avait engagé dans la carrière où les rois ses prédécesseurs avaient incessamment rencontré les inextricables embarras des querelles des deux puissances. Aussitôt sont nées pour lui les occasions, les tentations de briser des liens fragiles à coups d’autorité, et de s’affranchir en attentant diversement aux droits, ou, ce qui en politique est à peu près la même chose, aux prétentions des consciences. La confiscation du domaine de Saint-Pierre, l’enlèvement du pape, sa captivité, la détention des cardinaux, étaient au terme de la politique qui par le concordat avait fait à l’église une place dans le gouvernement.

Nous venons de parcourir tout le sujet traité dans le livre de M. de Pressensé. C’est un grand morceau d’histoire contemporaine, très intéressant, très instructif, neuf ou peu connu dans plusieurs de ses parties, et que l’auteur a su recomposer avec justesse et sagacité. L’esprit élevé, mais décidé, dans lequel il considère son sujet n’ôte rien à son équité, à sa modération, et ce livre, quoique écrit un peu rapidement, joint à l’importance de la matière le mérite d’une exécution facile et d’un style agréable qui ne nuit point au sérieux des pensées. Les vues générales de M. de Pressensé ne trouveront pas en nous de contradicteur, nous nous mettons volontiers à son point de vue ; mais la hardiesse nous manque pour le suivre dans ses conclusions. Nous aurons à expliquer cette inconséquence.


III

L’histoire des relations de l’église et de l’état se termine par le tableau de toutes les communions chrétiennes telles que la loi les a