Chose étonnante et qui semblerait incroyable, si elle n’était confirmée par les dépêches du général Pemberton, défenseur de Vicksburg, un de ces fantastiques vaisseaux parut tellement redoutable aux confédérés qu’ils s’empressèrent de faire sauter l’Indianola pour l’empêcher de tomber entre les mains de l’ennemi.
Ce que l’amiral Porter avait tenté vainement pour tourner Vicksburg, l’amiral Farragut l’entreprit avec plus de succès devant Port-Hudson. Au milieu de la nuit du 13 au 14 mars, il arrive au pied de la première falaise, non pas avec un seul navire, mais avec toute une flotte de quatorze vaisseaux, canonnières et bateaux à mortiers, car il ne s’agissait pas seulement d’essuyer le feu de pièces placées en batterie sur une longueur de 6 kilomètres, il fallait aussi vaincre un rapide courant de 5 ou 6 nœuds à l’heure. Les confédérés étaient avertis; de grands feux, allumés sur la rive droite, illuminaient de leurs reflets toute la surface du fleuve. Le vaisseau-amiral le Hartford, entré le premier dans le terrible défilé, engagea la lutte avec les redoutes des falaises, et, suivi de tous les autres navires, qui rendaient comme lui feu pour feu, il fendit le courant à force de vapeur. Le combat, sans cesse déplacé à mesure que la flotte arrivait en face d’autres batteries, dura près de deux heures; mais de temps en temps un navire dont la machine était brisée par les boulets se détachait du convoi, et, porté sur le fil du courant, descendait pour aller jeter l’ancre en aval des fortifications ennemies. Les deux beaux vaisseaux le Monongahela et le Richmond furent ainsi mis hors de combat. Le Mississipi s’échoua sur un banc de sable en face de la plus formidable batterie de Port-Hudson, et devint la cible des boulets : incendié par son propre équipage et s’allégeant peu à peu de son poids sous l’action des flammes, il se remit à flot et descendit majestueusement le fleuve en lançant dans toutes les directions les obus que la chaleur de l’immense foyer faisait éclater. Deux vapeurs seulement réussirent à forcer complètement le passage, le vaisseau-amiral et la canonnière Albatross. Il était à craindre que ces deux navires ne partageassent le sort de la Queen of the West et de l’Indianola, et ne fussent à leur tour capturés par les confédérés; mais il n’en fut rien. Le 17, l’amiral Farragut obtenait la reddition de la ville de Natchez; le 21, il arrivait en aval des batteries de Vicksburg. Encouragé par le demi-succès de son frère d’adoption, David Farragut, l’amiral David Porter voulut tenter un nouvel effort, et le 25 deux nouvelles canonnières passaient sous le feu de Vicksburg : l’une chavira et sombra, l’autre, le Switzerland, eut sa machine transpercée d’un boulet; mais, grâce au courant du Mississipi, elle atteignit l’endroit où l’attendaient les deux vapeurs de Farragut. Avec sa flottille de trois bateaux, l’amiral devint maître du fleuve. Tandis que l’escadre confédérée, descen-