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Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 53.djvu/598

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Les résultats matériels de la prise de Vicksburg étaient considérables. Près de 30,000 prisonniers, 200 canons, 100,000 fusils et autres armes, des munitions de toute espèce tombaient entre les mains du vainqueur. En outre la chute de cette forteresse des confédérés rendait tout à fait intenable la place de Port-Hudson, qui d’ailleurs n’aurait guère pu résister plus longtemps. Le 8 juillet, elle se rendit aux forces du général Banks avec plus de 6,000 hommes et 50 pièces de canon. En s’emparant de ces deux villes, les fédéraux prenaient en même temps possession de tout le Mississipi, depuis sa source jusqu’à son delta. Les états de l’ouest retrouvaient leur ancien débouché vers le golfe du Mexique; la Nouvelle-Orléans et la Basse-Louisiane, qui depuis plus d’une année n’avaient été accessibles que par mer, étaient désormais rattachées au reste des États-Unis pour les opérations militaires et les transactions commerciales; enfin la confédération des états rebelles était définitivement coupée en deux moitiés par les bateaux cuirassés du Mississipi et par les garnisons de ses forteresses riveraines. Pour la première fois depuis le commencement de la guerre, les armées et les flottes fédérales formaient un cordon militaire non interrompu autour des principaux états rebelles. Cette énorme étreinte, que le gouvernement de Richmond lui-même comparait aux replis d’un gigantesque boa, se resserrait peu à peu, menaçant d’étouffer tôt ou tard la confédération esclavagiste.

Quelques jours après la victoire de Gettysburg et la chute des deux grandes forteresses méridionales du Mississipi, la ville de New-York devenait le théâtre d’événemens honteux, qui, tout en créant de sérieuses difficultés au gouvernement de Washington, devaient finir cependant par rendre de grands services à la cause de l’Union en déshonorant aux yeux de tous les citoyens patriotes les meneurs du parti soi-disant démocratique des copper-heads. Une horrible émeute, à laquelle les opérations du recrutement servirent de prétexte, éclata le 13 juillet dans l’un des quartiers les plus mal famés de New-York, et, profitant de la stupeur générale, se rendit bientôt maîtresse d’une grande partie de la cité. Un nommé Andrews, qui se proclamait hautement l’allié des rebelles du sud, avait pris le commandement de la bande des pillards, composée presque uniquement d’Irlandais. A la vue du drapeau fédéral, ils s’écriaient : « Déchirez ce chiffon maudit! » à la vue d’un noir : « Brûlez ce nègre damné ! » Ils pourchassaient dans les rues tous les hommes de couleur qui osaient se montrer, et quand ils les avaient saisis, ils les pendaient aux réverbères, allumaient des bûchers sous les corps pantelans et dansaient autour des cadavres avec des cris de cannibales. Ils livrèrent aux flammes le bel hospice des orphe-