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renonce aux longs cols tortueux ; il conserve les mêmes ballons terminés par une pointe effilée et les mêmes liquides qu’il fait bouillir pendant longtemps. Quand le jet de vapeur a balayé tout l’air que contenait le vase, il le ferme en fondant la pointe au chalumeau. Le ballon restant privé d’air après le refroidissement, les liquides s’y conservent indéfiniment sans moisissure, sans infusoires, sans altération d’aucune sorte. À un moment donné, on ouvre le ballon dans l’air en cassant la pointe avec des pinces passées au feu ; aussitôt après on le referme en la fondant de nouveau, et l’on a, pendant le peu de temps que le vase était ouvert, puisé dans l’atmosphère et enfermé au contact de la liqueur putrescible un volume d’air limité avec tout ce qu’il contenait, avec toutes ses propriétés connues ou inconnues. Si vous êtes hétérogéniste, vous trouverez réunies dans cette préparation toutes les conditions qui déterminent les générations spontanées, et vous prédirez que chaque liquide se peuplera de toutes les espèces qui s’y développent quand il est abandonné à l’air libre. Si vous êtes panspermiste, vous raisonnerez ainsi. — En introduisant l’air dans le ballon, j’introduis en même temps les germes qu’il contenait ; mais il est certain qu’un volume aussi petit ne renfermera pas à la fois des spores et des œufs de tous les infusoires et de toutes les mucédinées connus, et comme ceux qu’il contient appartiennent à des espèces variées, il y aura nécessairement de grandes différences dans les résultats, si je répète plusieurs fois l’expérience. Aujourd’hui j’introduirai quelques spores de pénicillium glaucum, et demain ce champignon aura poussé à la surface du liquide. Dans un second ballon, l’air pourra apporter des œufs de kolpodes qui éclôront plus tard. Une autre fois des bactéries remplaceront les kolpodes, et en général la même solution se peuplera d’êtres différens et variés dans divers ballons. Il pourra même arriver que sur un grand nombre il y ait quelques prises d’air dépourvues de germes, et dans ce cas elles resteront indéfiniment stériles, quoique toutes les conditions réclamées par l’hétérogénie soient, réalisées. Cette stérilité devra se rencontrer assez souvent dans les caves et les lieux où l’air est calme, — pendant l’hiver, où la vie sommeille, — après la pluie, quand les germes ont été précipités. Elle sera plus rare en été, après une longue sécheresse et dans les lieux où l’air est très peuplé, comme la Sologne. — Telles sont les conséquences naturelles des principes de la panspermie. Cette fois encore l’expérience lui donne raison en confirmant avec une rigueur mathématique le raisonnement que nous venons de développer.

Que répond l’hétérogénie ? « Avec ces procédés, l’on peut faire d’excellentes conserves d’Appert, mais on ne fait pas des expériences physiologiques dignes de ce nom. » M. Joly a de l’esprit,