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comme on en a redressé dans la Terre avant le déluge et la Terre et les Mers. Quelques dessins sont remarquables de vérité et d’exécution, et la division de l’œuvre est satisfaisante. La dernière partie, la géographie botanique, qui traite de la loi de distribution des végétaux à la surface du globe, est bien conduite. En somme, on reconnaît là un certain talent d’exposition, et, dans le courant de l’ouvrage, l’auteur semble se défier d’un écueil qu’il n’a pas toujours su éviter dans de précédentes publications. Il maîtrise ici son penchant aux explications forcées, douteuses, nous dirions presque surnaturelles. Une fois cependant il se laisse encore entraîner, et, pour donner des raisons de la tendance des racines à se diriger vers le centre de la terre, il invoque nous ne savons quelles expériences bizarres faites par des chercheurs isolés, expériences qui auraient besoin d’être contrôlées, et contrôlées solennellement. Au lieu d’imaginer ainsi des preuves contre nature, ne pourrait-on tout simplement admettre une bonne fois, comme le font du reste la plupart des traités de botanique, que si la racine se dirige vers le centre de la terre, la tige vers le ciel, c’est que l’une trouve dans le sol, l’autre dans l’atmosphère, sa propre nourriture, c’est que cet agent mystérieux qu’on appelle force vitale l’exige ainsi ? La pesanteur, ou, si l’on veut, la force de gravitation, autre agent dont l’essence est également inconnue, n’a point de rôle à jouer dans ce grand phénomène.

Les réserves que nous venons de faire nous empêchent de mettre sur la même ligne l’Histoire des Plantes de M. Figuier et la Plante de M. Grimard. Ce dernier livre est vraiment un traité original de botanique. On devine que l’auteur n’a emprunté ses inspirations qu’à lui-même. Dans un format modeste, avec des dessins qui attirent moins les yeux que ceux de son rival, cet ouvrage est mieux fait et semble destiné à une longue vie. Ce n’est pas une compilation improvisée, c’est le livre d’un homme qui sent, qui a vu et qui sait. Dans la première partie, l’auteur chante la plante dans une forme un peu dithyrambique ; mais bien vite, dans le second volume, le langage calme et mesuré du savant reprend le dessus, et c’est là la partie vraiment pratique et utile du livre. Voulez-vous être botaniste, voulez-vous herboriser à votre aise dans les vertes campagnes autour de Paris, lisez-le, inspirez-vous-en. Voulez-vous rester philosophe et ne connaître de la plante que ce qui vous intéresse dans le grand monde de la vie, tenez-vous-en au premier volume. Lire et méditer les deux est ce qui vaut mieux encore. L’auteur a fait heureusement entrer dans son cadre quelques bonnes pages de botanique géologique dont on néglige trop généralement de s’occuper en dehors des livres de géologie, et il nous a montré, non sans un certain bonheur d’expression, la vie végétale naissant sur le globe avec les plus humbles cryptogames, puis se développant avec les fougères, les palmiers, et arrivant enfin, avec les grands arbres dicotylédones, au degré de magnifique éclosion où nous la voyons aujourd’hui.

Quelle conclusion tirer de ces pages et quels services peuvent rendre