Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/688

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dition d’inaliénabilité, ne constitue point le mode d’emploi qui se prête le mieux à une prompte réalisation? On a parlé d’achat de papier à l’étranger : c’est alors que le commerce se plaindrait de voir employer ailleurs les ressources du pays. Enfin on a imaginé que la Banque pourrait entretenir un encaisse considérable en échangeant ses titres de rente contre des métaux précieux et en conservant ceux-ci dans ses caves : singulier moyen, il faut l’avouer, pour obtenir cette économie du capital métallique dans laquelle on prétend voir en même temps une source de prospérité pour le pays! singulière prétention aussi que celle qui consiste à vouloir maintenir le niveau de la réserve en numéraire sans toucher en rien aux causes qui en déterminent la diminution successive!

On exagère étrangement la portée de la mesure proposée. Si le capital de la Banque est transformé en fonds de roulement, s’il se trouve absorbé par les opérations courantes, le crédit de l’institution ne souffrira-t-il point de l’absence d’un fonds permanent de garantie? Suivant l’idéal entrevu par le comte Mollien, ce crédit devrait être assez solide pour permettre à la Banque de fonctionner même sans capital. Nous avons changé tout cela! — Pourquoi? Est-ce pour accroître la somme des billets au moyen d’un surcroît d’encaisse? Alors la puissance agrandie de la réserve ne fortifiera en rien la sécurité correspondante de l’émission. — Est-ce pour diminuer d’une manière constante l’écart entre la réserve et les billets? Il faut d’autres digues pour arrêter le mouvement des espèces; il obéit à d’autres lois. — Est-ce pour maintenir l’escompte à un taux invariable? La naïveté d’une pareille prétention n’est égalée que par l’impuissance de l’instrument mis en œuvre. — Est-ce pour augmenter les avances sur fonds publics et sur autres valeurs? Dans ce sens, si l’on bornait strictement ces avances au capital disponible, il n’y aurait pas grand danger : resterait seulement à savoir si le crédit de la Banque gagnerait à substituer une garantie mobile, affectée à un service spécial, à la garantie fixe d’un placement en rentes. D’ailleurs les plaintes du commerce, fondées ou non, qui ont provoqué l’enquête, tendent à un résultat diamétralement opposé. Les avances sur titres profitent à la spéculation, elles n’intéressent guère la production et l’échange. S’il est un reproche mérité parmi ceux qu’on a soulevés contre la Banque, c’est qu’elle se soit chargée depuis 1852 d’une mission étrangère aux attributions naturelles où elle devrait se renfermer. « Je ne comprends en fait de banque que l’escompte, » disait Napoléon, et il parlait sagement; l’action de la Banque gagnerait à se concentrer ainsi, et le commerce en retirerait un avantage sérieux.

Les avances sont en partie la cause des embarras que nous avons traversés ; la Banque a bien fait de les restreindre, elle ferait en-