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Atlantide[1], s’abîment peu à peu dans l’océan. Tous les faits militent ainsi en faveur de l’hypothèse d’après laquelle le pourtour du globe offrirait dans sa partie équatoriale trois vagues de soulèvement séparées les unes des autres par trois dépressions intermédiaires. Les centres de chaque dépression tombent au milieu d’un océan ; les trois régions exhaussées sont précisément le grand archipel de la Sonde, espèce de continent en formation, et les masses énormes de l’Afrique et de l’Amérique du Sud. On le comprend, ces oscillations régulières de la surface terrestre ne peuvent s’accomplir qu’en vertu d’une loi générale encore inconnue, mais certaine. On ne saurait y voir de simples phénomènes locaux produits par des tremblemens volcaniques, des tassemens ou des ruptures de l’écorce terrestre, et d’ailleurs ces faits eux-mêmes, partout où ils se produisent, sont déterminés par des causes qui affectent la masse entière de la planète.

Un jour, lorsque les savans auront observé du pôle nord au pôle sud toutes les lignes de niveau, tous les débris que la mer a laissés comme autant de mesures de précision sur le littoral des terres et sur les flancs des montagnes, on pourra dire exactement quelles sont les dimensions de chaque vague de soulèvement et quelle force d’impulsion les anime. On saura si les régions exhaussées égalent toujours en étendue les régions qui s’affaissent, si la surface de la terre, semblable à celle de tous les corps vibrans, offre certaines « lignes nodales » autour desquelles les parties agitées se disposent en figures rhythmiques, si les continens et les mers, soulevés et déprimés tour à tour comme par une marée séculaire, se déplacent lentement autour de la planète. Quoi qu’il en soit, il demeure incontestable qu’un mouvement incessant fait onduler l’écorce dite rigide de notre globe. Les masses continentales s’élèvent pendant une longue série de siècles, puis elles s’abaissent de nouveau pour s’exhausser encore. Et toutes ces oscillations, comparables au va-et-vient d’un balancier, s’accomplissent avec lenteur et majesté. La Scandinavie, qui s’élève actuellement, s’abaissait pendant la période glaciaire, et les populations qui, dès cette époque, y faisaient leur demeure, étaient forcées d’abandonner pas à pas les vallées transformées en fjords. De même les Andes chiliennes et les montagnes de la Nouvelle-Zélande, aujourd’hui grandissantes, se sont abaissées par degrés, les premières de 2,500, les secondes de 1,500 mètres, avant de s’exhausser comme elles le font aujourd’hui. Sur un grand nombre d’autres points, au Pérou, en Égypte,

  1. Les recherches de Heer sur la flore des îles de l’Atlantique ont donné un caractère de grande probabilité à l’existence d’un ancien continent placé entre l’Europe et les Antilles.