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calculs nécessaires, dont le résultat définitif donne pour le sommet du Mont-Blanc une élévation de 4,810m,0 au-dessus de la Méditerranée. Le chiffre déduit de nos quatre observations barométriques ne différait donc que de 0m,4 du résultat moyen de la géodésie. Les circonstances météorologiques avaient été propices pour obtenir une bonne altitude, et les heures choisies très favorables. En effet, M. Plantamour, directeur de l’observatoire de Genève, après avoir déterminé la hauteur de l’hospice du Saint-Bernard au-dessus du lac Léman par deux nivellemens directs partant du lac et aboutissant au seuil du couvent, en a ensuite calculé la hauteur par dix-huit années d’observations barométriques correspondantes à celles de l’observatoire de Genève. Le résultat de cet immense travail, c’est que les observations barométriques correspondantes, prises entre deux heures et quatre heures de l’après-midi, ne donnent, en août et septembre, qu’une erreur probable de 1/1200 de la hauteur, soit 1 mètre pour 1,300 mètres environ, On comprend que des observations barométriques plus nombreuses doivent inspirer plus de confiance encore. Du 15 juillet au 7 août 1841, nous fîmes, Bravais et moi, au sommet du Faulhorn, cent cinquante-deux observations barométriques continuées de jour et de nuit de trois heures en trois heures. La moyenne de ces observations donne 2,682 mètres pour la hauteur de cette montagne ; le chiffre de la géodésie est de 2,683 mètres : ainsi, encore dans ce cas, le baromètre est l’égal du théodolithe, et de nombreuses observations barométriques équivalent à la répétition des angles mesurés sur le cercle de l’instrument.

La hauteur du Mont-Blanc ne paraît pas avoir sensiblement varié depuis la première mesure faite en 1775 par Schuckburgh jusque dans ces derniers temps. Cette constance a lieu d’étonner : ce sommet est formé uniquement de neiges et de glaces dont Saussure estimait l’épaisseur à 65 mètres environ ; il est donc évident que le Mont-Blanc est une pyramide semblable à sa voisine l’Aiguille-du-Midi. Les Rochers-Rouges, les Petits-Mulets, la Tourette, sont des pointes encore saillantes de cette pyramide ; le reste est recouvert d’une calotte de neige ou plutôt de glace qui ne fond plus à cause de l’élévation de la montagne, au sommet de laquelle la température de l’air est très-rarement à 2 ou 3 degrés au-dessus de zéro et presque constamment fort au-dessous. On se demande donc comment il se fait que l’épaisseur de cette calotte de neige soit invariable et que l’altitude de la montagne ne change nullement suivant les saisons et même suivant les années. En effet, la quantité de neige qui y tombe, les vents qui la balaient, l’évaporation qui en diminue l’épaisseur, la condensation des nuages qui l’augmente varient d’une année à l’autre : aussi la forme du sommet