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pour Rome, la grande épreuve et ce que nous avons appelé la seconde période. Pendant la première, disions-nous, la révolution avait opéré par la force, qui dans l’ordre moral ne prouve rien et n’achève rien. Pendant la seconde, elle va opérer par l’idée, se reconnaître, se définir, et montrer qu’à part tout son limon de passions humaines, elle roule pourtant dans le vrai courant de l’histoire. Sa maxime est que l’étude libre est le droit de l’intelligence, que l’examen sérieux est le chemin de la vérité, et que la raison bien conduite finit toujours par avoir raison. La maxime de Rome au contraire, exprimée ici par Consalvi, est que le « bon principe » n’est point de force à lutter contre le mauvais, que la seule vérité ne suffit pas à dissiper l’erreur, et qu’il y faut le bras du pouvoir exterminant l’hérésie. C’est sur ces deux maximes opposées que le combat va s’engager de nouveau pour un demi-siècle. Rome cherche donc des alliances ; sa politique se noue à celle des monarchies absolues, et en particulier de l’Autriche, qui ne lui épargne pas les bons conseils. « Restez fort chez vous, monseigneur, écrit Metternich à Consalvi en 1819 ; tombez à bras raccourci sur les fous et les scélérats ; écrasez les intrigans, et vous diminuerez les intrigues. Comptez en toute occasion et en toute sûreté sur l’appui que la bonne cause trouvera chez nous. » Ne dirait-on pas que cette vive et alerte épître soit devenue, sous les règnes suivans, la charte autrichienne de la restauration pontificale ? Et voilà pourquoi le motu proprio de 1816, annoncé par Consalvi au congrès de Vienne, ne tint pas les promesses de son préambule ; voilà pourquoi sous Léon XII on vit, parmi quelques améliorations de police et de finance, les formes judiciaires ramenées à l’extrême rigueur, l’instruction publique retournée en arrière, les progrès matériels abandonnés ; voilà pourquoi le memorandum des cinq puissances de 1831 n’obtint que des résultats insignifians. À vrai dire, pouvait-il en être autrement aussi longtemps que « le bon principe, » jugé incapable de se soutenir lui-même, aurait besoin du bras de M. de Metternich ? Qui donc pouvait se faire illusion ? qui donc ne comprenait très bien que chacune de ces modestes réformes si humblement demandées en appellerait une autre, et puis une autre, que l’introduction en plus grand nombre des laïques dans l’administration en changerait l’esprit, qu’enfin au bout de tout cela on trouverait toujours devant soi ce monstre anonyme, la presse, avec l’examen, la liberté de conscience, et autres étrangetés subversives, inintelligibles, formidables ? Il n’y avait donc rien à faire, si ce n’est résister jusqu’à rompre, et c’est ce qu’on fit. La forteresse tomba en 1848, et l’ennemi, selon la prédiction de Consalvi, « y entra avec armes et bagages. » Depuis lors, le pouvoir temporel dans