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de nos cardinaux et de nos légistes, le discours sensé et net de M. Rouher nous semble avoir ramené le débat au vrai. Au lieu d’entasser mille imaginations sur ce que feront ou ne feront pas dans deux ans le pape et l’Italie, pourquoi ne pas prendre la convention au sens littéral et ne pas attendre l’avenir avec confiance ? Croyons que la convention sera exécutée. Elle le sera, nous en sommes convaincus, par l’Italie, beaucoup moins friande qu’on ne le suppose en France d’accroître ses difficultés religieuses, de transporter son gouvernement à Rome, et qui ne serait pas médiocrement désappointée, si elle cessait de posséder la papauté dans son sein. Que ne laisse-t-on en présence l’un de l’autre et en tête à tête le royaume d’Italie et la cour de Rome ? On est Italien des deux côtés, on se connaît à fond, on n’est point sot : ce serait bien le diable si l’on ne parvenait point à s’entendre entre soi, quand l’étranger, le barbare aura tourné les talons. Si l’on ne prend pas le parti d’accepter la convention dans sa signification littérale, on n’est en présence de tous côtés que de chimères, d’utopies, de projets irréalisables, de visions impossibles. On prétend que la convention du 15 septembre rencontrera au corps législatif un redoutable adversaire ; il nous charmera par son esprit, mais nous serons bien étonnés s’il peut nous suggérer une solution de la question italienne et romaine plus modérée et plus praticable que la convention du 15 septembre. L’Italie, en attendant, achève de terminer ses préparatifs et de se mettre en règle. Les lois d’unification administrative sont votées. Ce sont surtout les mesures financières projetées par M. Sella qui méritent d’être prises en considération. Le ministre des finances s’est décidé à recourir à l’emprunt plus tôt que nous ne nous y étions attendus. M. Sella, envisageant la situation financière de l’Italie, a voulu l’embrasser dans une période qui dépasse l’exécution de la convention du 15 septembre. Il est très sage d’avoir étendu ainsi les prévisions financières au-delà de la grande échéance politique. Il a calculé que les insuffisances du trésor s’élèveraient au milieu de 1867 à 625 millions, et ces insuffisances, il a voulu les combler immédiatement par une aliénation des chemins de l’état qui doit rapporter 200 millions et par un emprunt de 425 millions. Ce parti-pris, que M. Sella complète par des mesures et des augmentations d’impôt qui doivent accroître les revenus ordinaires, créera sans doute à l’Italie une situation financière exceptionnellement favorable. L’Italie pourra voir venir, munie d’argent, les événemens que les deux prochaines années peuvent réserver à l’Europe. Il y a peu d’états sur le continent qui seront aussi bien lestés pour affronter l’inconnu. Cette sécurité financière relative ne peut manquer, une fois l’emprunt négocié, d’exercer une influence favorable au crédit du pays et à la hausse des fonds italiens. À ce point de vue, il n’est point inopportun de rendre au prédécesseur de M. Sella, à M. Minghetti, une justice qui lui est due et qui doit aussi profiter au crédit de l’Italie. Les attaques de parti dirigées contre les anciens ministres, MM. Minghetti et Peruzzi, avaient beaucoup nui depuis six mois au crédit des fonds italiens. Les ennemis de