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M. Minghetti avaient prétendu que les documens présentés par ce ministre sur la situation financière étaient inexacts et ne laissaient point voir toute la gravité de cette situation ; on l’accusait encore de n’avoir préparé aucune ressource pour faire face aux découverts. L’exposé financier de M. Sella, qui n’est certes point intéressé à se faire l’apologiste complaisant de son prédécesseur, a dissipé ces calomnieuses erreurs. Les chiffres du découvert donnés par M. Sella ont à très peu de chose près coïncidé avec les chiffres de M. Minghetti. Rien donc n’avait été dissimulé. En quittant le ministère à la fin de septembre, M. Minghetti laissait à son successeur un encaisse au trésor de 75 millions ; la vente des chemins de l’état avait été convenue ; enfin les nouveaux impôts établis par M. Minghetti ont donné des résultats si satisfaisans, que c’est dans l’augmentation de certains de ces impôts, celui de la richesse mobilière par exemple, que M. Sella cherche les nouveaux produits qu’il doit ajouter au revenu ordinaire. Ces faits sont intéressans à noter à un double point de vue : d’abord ils lavent un serviteur éminent de l’Italie et le cabinet qu’il présidait d’imputations imméritées ; ensuite ils montrent au public financier de l’Europe que l’on peut avoir confiance dans la sincérité des chiffres présentés par les ministres italiens, puisque les états financiers exposés par deux ministres appartenant à des partis différens se confirment en se contrôlant l’un par l’autre, et donnent des résultats concordans.

E. FORCADE.


LE CONGRÈS SUD-AMERICAIN ET LE PÉROU.


On connaît aujourd’hui les clauses du traité conclu entre l’Espagne et le Pérou. Le dernier mot est resté à la force. Le gouvernement péruvien a dû accepter l’ultimatum qui lui a été signifié par l’amiral Pareja. L’Espagne a désavoué ses premiers plénipotentiaires pour s’être servis du mot de « revendication » dans la déclaration qui a suivi la prise des îles Chinchas ; mais en même temps le Pérou a dû reconnaître toutes les dettes réclamées par le gouvernement espagnol et payer les frais de l’expédition. L’opinion publique, dans le continent du sud tout entier, a profondément ressenti la blessure faite par ces derniers événemens à l’amour-propre, à l’orgueil de la jeune race américaine. À ce moment, chacune des petites républiques néo-Iatines de l’Amérique du Sud était doublement représentée au Pérou ; à côté et indépendamment du corps diplomatique ordinaire, accrédité auprès du général Pezet, un congrès sud-américain siégeait à Lima.

Dans les premiers mois de 1864, une circulaire du ministre des relations extérieures du Pérou, M. Ribeyro, avait invité tous les états du continent sud-américain à former un congrès où seraient discutées les bases d’une ligue propre à « fusionner les forces matérielles et intellectuelles de la race néo-latine. » En présence d’une chambre qu’il se sentait impuissant à contenir, et où les aspirations les plus démagogiques tendaient à se faire