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ports de commerce entre la France et les autres nations. Il faut remarquer seulement que le blocus continental, en écartant la concurrence de l’industrie anglaise, avait surexcité l’industrie française au point de l’engager à produire, sans égard à l’élévation excessive des prix de revient, tous les articles qui pouvaient se consommer dans le pays. Pour ne citer qu’un exemple de cette production tout à la fois universelle et artificielle, il suffit de rappeler que la fabrication du sucre avec la betterave date de cette époque. L’intérêt manufacturier était donc nécessairement en possession d’une influence très considérable lorsque la restauration vint remplacer l’empire, et il puisait en outre une nouvelle force dans les combinaisons politiques du gouvernement, qui rêvait la reconstitution d’une aristocratie au moyen de la plus-value que donnerait à la propriété foncière l’exclusion presque absolue de toute concurrence étrangère quant aux produits agricoles. Ainsi coalisés, l’intérêt industriel et l’intérêt foncier réussirent à obtenir le relèvement des tarifs. Ils étaient d’ailleurs secondés dans leurs efforts par la doctrine de la balance du commerce, doctrine qui prévalait encore presque partout, et selon laquelle un pays qui importe plus de marchandises qu’il n’en exporte marche infailliblement à sa ruine. Cette situation n’était point favorable pour la conclusion des traités de commerce. Cependant par la force des choses la restauration se vit obligée de se départir des règles absolues du système prohibitif en accordant aux États-Unis et à l’Angleterre, par les traités de 1822 et de 1826, le régime de l’égalité réciproque, relativement aux droits maritimes, pour l’intercourse direct. Les États-Unis et l’Angleterre n’avaient point voulu tolérer plus longtemps que leurs pavillons fussent repoussés de nos ports par des surtaxes. Sous peine de subir leurs représailles, il fallut leur céder. Ce fut un premier pas vers les réformes libérales. On entrait ainsi dans le régime de la réciprocité.

Grâce au maintien de la paix, les principales nations européennes voyaient grandir leur industrie, et elles éprouvaient le besoin d’étendre leurs débouchés. La vente intérieure ne suffisant plus à l’écoulement de leurs produits, il leur fallait chercher des acheteurs au dehors. Le gouvernement de juillet dut s’appliquer à donner satisfaction à ce nouveau besoin, et sa diplomatie fut activement occupée à préparer des alliances commerciales et même des unions douanières, ce qui impliquait, à l’égard des états voisins, la suppression complète des tarifs. À en juger par le nombre des traités de commerce et de navigation qui furent conclus de 1830 à 1848 et qui embrassèrent à peu près toutes les parties du monde jusqu’à la Chine, le travail fut considérable, mais les résultats furent minimes.