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du christianisme dans son essence même, dans ses dogmes fondamentaux, ou, si l’on veut, dans sa simplicité, dans sa grandeur natives, en dehors de tout commentaire, de toute interprétation, de tout travail humain, par conséquent aussi avant toute dissidence, tout schisme, toute hérésie. C’est l’idée pure du christianisme qu’il entreprend d’exposer, pour en mieux démontrer les divins caractères.

Tel est son but. Que fait-il pour l’atteindre ? C’est au livre lui-même qu’on le doit demander, Ici, en quelques pages, que pourrions-nous en dire ? Comment analyser une œuvre dont on serait tenté de citer chaque phrase ? et d’un autre côté donner beaucoup d’extraits, c’est mutiler un livre et le faire mal connaître. Tâchons donc seulement d’en dire assez pour inspirer à ceux qui nous liront le désir beaucoup plus profitable de lire surtout M. Guizot.


I

Le début et la base de ces Méditations, ce qu’avant tout l’auteur tient à mettre hors de doute, c’est une vérité bien connue, mais qu’au temps où nous sommes il n’est pas inutile de promulguer encore. Cette vérité est que le genre humain, depuis qu’il existe et partout où il existe, se préoccupe de certaines questions qui lui sont, on peut dire, personnelles ; questions de destinée, de vie plutôt que de science, questions qu’invinciblement il aspire à résoudre. Et par exemple pourquoi l’homme est-il en ce monde, et ce monde lui-même, pourquoi existe-t-il ? D’où viennent-ils, Où vont-ils l’un et l’autre ? Qui les a faits ? Ont-ils un créateur intelligent et libre ? Ne sont-ils qu’un produit d’aveugles élémens ? S’ils sont créés, si nous avons un père, pourquoi ce père, en nous donnant la vie, nous la rend-il parfois si dure et si amère ? Pourquoi le mal ? pourquoi la souffrance et la mort ? L’espoir d’un sort meilleur au-delà de ce monde n’est-il que la chimère de quelques malheureux, et la prière, ce cri de l’âme en détresse, n’est-elle qu’un bruit stérile, une parole jetée au vent ?

Ces questions et bien d’autres encore qui les développent et les complètent, non-seulement le genre humain s’en préoccupe depuis qu’il est sur terre, mais seul il peut s’en occuper ! Elles ne s’adressent qu’à lui : parmi tous les êtres vivans, seul il les sait comprendre, et seul il s’en émeut. Triste et beau privilège, incontestable signe de sa royauté terrestre, son tourment et sa gloire à la fois !

C’est cet ensemble de questions, ou plutôt de mystères, que M. Guizot place en tête de ses Méditations, et qu’il résume en ces deux mots : « problèmes naturels. » L’homme en effet les tient de sa