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lesquels il est difficile de vivre, mais qui ne sortent pas de la constitution. La manière dont il parle des montanistes est tout à fait celle d’un homme qui leur donne raison sous bien des rapports, mais qui n’aime pas leur tendance séparatiste. Si Hippolyte n’a pas été excommunié par Calliste, c’est sans doute que, tout en n’ayant pas pour lui la majorité, il était à la tête d’une minorité puissante qu’il fallait ménager. On peut avec M. Dœllinger penser que jusqu’à la fin son humeur resta la même, et j’admettrai volontiers avec lui que son exil en compagnie de l’évêque Pontien dans les premiers jours du règne de Maximin le Thrace, qui était encore fort occupé en Allemagne, exil par conséquent décrété par quelque magistrat urbain, fut un de ces moyens que l’administration césarienne aimait à employer quand elle espérait faire la paix en imposant le silence. C’est une erreur de croire qu’avant Constantin l’autorité temporelle ne se mêla jamais des débats intérieurs de l’église chrétienne : elle intervint pour forcer Paul de Samosate à quitter Antioche, et en 309 l’empereur Maxence exilait le pape Marcellus parce qu’il se montrait trop sévère pour ceux qui avaient faibli dans les persécutions.


II

Nous arrivons enfin aux renseignemens qu’Hippolyte nous offre sur l’état de l’église romaine de son temps, et qui, après avoir nui pendant des siècles à la propagation de son livre, sont aujourd’hui le principal attrait qui le fasse lire.

Après avoir décrit dans huit grands chapitres les systèmes des philosophes grecs et des gnostiques, Hippolyte s’attaque à des hérésies d’un genre particulier, car elles sont dans l’église, elles s’y prélassent en quelque sorte. Ce sont principalement celles qui concernent la personne du Christ, et pour représentans à Rome elles n’ont pas moins que des évêques. Calliste surtout doit être dénoncé à l’indignation de l’église chrétienne, tant pour son caractère, indigne de sa haute position, que pour les funestes erreurs qu’il a professées. Voici son histoire.

Sous le règne de Commode (180-193)[1], vivait un chrétien

  1. Pour aider le lecteur à s’orienter dans la suite de ce récit, je reproduis la liste des évêques de Rome parallèlement à celle dos empereurs — depuis Éleuthère, contemporain d’Irénée, jusqu’à Pontien, compagnon d’exil d’Hippolyte :
    177-190 Éleuthère 180-193 Commode.
    190-200 Victor 193 Pertinax.
    193-211 Septime Sévère.
    200-218 Zéphyrin 211-217 Caracalla.
    218-223 Calliste 217-218 Maccin.
    223-230 Urbain 218-222 Héliogabale.
    230-235 Pontien 222-235 Alexandre Sévère.