Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UN HIVERNAGE
CHEZ
LES ESQUIMAUX

 :Life with the Esquimaux, the narrative of Captain C. F. Hall, London 1864.

Il est des contrées qui nous repoussent, comme d’autres nous attirent. Autant la zone tropicale a d’attrait pour l’homme en lui promettant de loin les délices d’une existence facile et nonchalante, autant les régions polaires inspirent de répulsion, car sur une terre morne et stérile la nature ne satisfait à aucun des besoins de l’humanité ; c’est par une lutte incessante contre les élémens que les voyageurs qui traversent ces contrées, les indigènes même qui les habitent, peuvent assouvir leur faim, apaiser leur soif et se prémunir contre les atteintes d’une température pour laquelle le corps humain n’a pas été constitué. Le soleil, principe de toute vitalité énergique, n’y déverse que des rayons obliques et se cache pendant une partie de l’année ; ne semble-t-il point que là où la lumière fait défaut, la vie est près de s’éteindre faute d’aliment, et ne subsiste que par grâce ? Qu’est-il besoin d’ailleurs de fouiller les terres polaires et d’approfondir les mystères qu’elles recèlent, tant qu’à la surface du globe il restera d’autres régions inexplorées qui ne portent pas dans leur sein un germe de mort et de désolation ? Une industrie pleine de hasards et de dangers, la pêche de la baleine, attire encore néanmoins quelques navigateurs dans les mers arctiques. La baleine franche, le plus gros des cétacés et aussi le plus productif en huile, qui descendait autrefois, dit-on, jusqu’aux