Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/993

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le cerveau cache les autres parties de l’encéphale, plus l’animal est intelligent. — Chez les rongeurs, dit M. Flourens, les hémisphères ne recouvrent même pas les tubercules quadrijumeaux ; dans les ruminans, ils les recouvrent ; dans les pachydermes, ils atteignent le cervelet ; dans les orangs, ils recouvrent le cervelet ; dans l’homme, ils le dépassent. Or nous savons par Frédéric Cuvier que l’ordre d’intelligence chez les mammifères est précisément celui que nous venons d’indiquer : à savoir les rongeurs, les ruminans, les pachydermes, les carnassiers, les singes et l’homme. M. Leuret reconnaît aussi qu’il y a là un fait qui mérite d’être pris en grande considération, et il est très vrai que tous les animaux dont le cervelet est recouvert par le cerveau sont des animaux intelligens, et que beaucoup d’autres, où il est découvert, sont plus ou moins stupides. Cependant il ne faudrait pas voir là, suivant lui, l’expression d’une loi, car, d’après ce nouveau critérium, le renard et le chien seraient placés au même rang que le mouton, et fort en arrière du phoque et de la loutre ; le singe d’ailleurs serait aussi bien partagé que l’homme et même, quelquefois l’emporterait sur lui. Ce n’est donc pas encore là un fait auquel on puisse attribuer une valeur décisive et absolue.


II

Si maintenant, au lieu de suivre la série animale en général, nous nous renfermons dans l’espèce humaine, nous trouverons encore, comme tout à l’heure, un certain nombre de faits qui accusent une corrélation incontestable entre le cerveau et la pensée, mais aussi beaucoup de faits contradictoires et embarrassans.

D’abord, il est un point sur lequel on s’accorde, c’est que sans cerveau il n’y a pas de pensée : c’est ce que prouve suffisamment l’exemple des monstres acéphales. En second lieu, ce qui n’est pas davantage contestable, c’est qu’au-dessous d’une certaine limite de volume cérébral la pensée est également comme si elle n’était pas. Suivant M. Lélut, cette limite, au point de vue du développement du crâne pris dans sa grande circonférence horizontale, est de 16 à 17 pouces, et au point de vue de la pesanteur du cerveau d’environ 1,000 grammes. Au-dessous de ce poids, un cerveau humain est fatalement condamné à l’idiotisme et à l’imbécillité.

Il n’est pas tout à fait aussi bien établi que le poids et la consistance du cerveau augmentent et décroissent avec l’âge. Voici comment Gall nous décrit cette évolution. Dans l’enfant nouveau-né, le cerveau ne manifeste aucune fibrille nerveuse : c’est une sorte de