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souvent, si les occasions paraissent propices, des morceaux qu’il lui conseilles d’acheter. Ces détails d’archéologie ou d’esthétique remplissent presque toutes les lettres adressées par Piranesi à Gustave III ; les dépêches à M. de Fredenheim contiennent de préférence les comptes-rendus des acquisitions faites ou préparées pour la couronne suédoise. Les principales furent certainement une remarquable série de muses antiques, obtenue par les soins du sculpteur suédois Sergel à Rome, et la belle statue d’Endymion, acquise du comte Centini par l’intermédiaire de Piranesi pour une somme de 4,000 écus le 23 avril 1785. Piranesi fit acheter, en outre, soit par le roi de Suède., soit par les principaux personnages de la cour une foule d’objets d’art qui ornent aujourd’hui le musée de Stockholm ou les riches galeries. Particulières de la Suède. Gustave III accepta la dédicace des grands ouvrages gravés que Piranesi préparait, et, si vous feuilletez son volume contenant « les statues les plus célèbres, » vous verrez cette cour suédoise y faire, dans les dédicaces, une assez bonne figure.

Outre Piranesi, Sergel, Adlerbeth et Essen, qui lui faisaient une brillante escorte, Gustave rencontra dans Rome, deux artistes, français : il commanda au peintre Gagnereau, une grande toile représentant la Rencontre du roi de Suède avec Pie VI dam les galerie du Vatican, et au peintre Desprez, associé de Piranesi, deux tableaux ; la Messe papale le jour de Noël et l’Illumination de la croix de Saint-Pierre. Desprez avait séduit Gustave par la vivacité de son pinceau ; le roi, qui n’oubliait pas son théâtre de Stockholm, l’attira en Suède. Doué d’imagination, épris de la nature du Nord, il contribua pour sa bonne part à l’éclat des fêtes suédoises. Il composa pour les opéras de Gluck, et pour les tragédies du nouveau théâtre d’imposans décors, dont la tradition se conserve aujourd’hui. Architecte, il dessina le joli pavillon de Haga, résidence d’été toute voisine de Stockholm, et donna le plan du château que le roi comptait édifier dans ce lieu de plaisance. Peintre de marine, il accompagna Gustave III pendant sa guerre de Finlande, dont il dut représenter les scènes principales dans une série de tableaux. Ces travaux lui valurent la faveur du roi, celle de l’opinion, et une situation élevée dont il put jouir pendant une résidence de vingt ans en Suède.

Les lettres de Piranesi témoignent que Gustave III avait songé à instituer dans Rome une académie pour les jeunes artistes suédois sur le plan de l’Académie de France. La Suède y avait déjà des pensionnaires, parmi lesquels nous trouvons un Français de naissance, Louis Masreliez, dont le père, avec tant d’autres de nos peintres et sculpteurs du XVIIIe siècle, avait été appelé à Stockholm