Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/517

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

transforme en prés une immense plaine qui leur fait suite. L’herbe y pousse avec tant d’abondance que les habitans du haras ne suffisent pas à la consommer, et que 100 bœufs par an trouvent encore à s’y engraisser. Le haras de Dangu renferme 5 étalons, 30 poulinières et 36 poulains d’un an. Les 5 étalons sont Monarque, Father-Thames, Ventre-saint-Gris, Palestro et Hospodar. Le plus renommé d’entre eux est Monarque, qui, né en 1852, gagna 22 courses sur 26 qu’il a courues, et qui, employé comme reproducteur depuis 1859, a rapporté à ce titre 81,750 francs à son propriétaire, à raison de 500 francs par saillie. Il est père de plusieurs chevaux distingués, Hospodar, Gédéon, Béatrix, le Mandarin, et surtout Gladiateur, le cheval le plus remarquable qu’on ait vu depuis longtemps.

Les poulains, tant que le temps le permet, sont laissés dans les paddocks, où ils errent en liberté en attendant que viennent pour eux le moment des épreuves ; on les met peu à peu au régime de l’avoine, afin d’augmenter leur force et leur vigueur. On les excite aussi à courir les uns contre les autres, et on les soumet successivement aux longues et minutieuses opérations du dressage, de façon à les habituer à supporter la bride, la selle et le cavalier. C’est d’ordinaire à dix-huit mois qu’on les envoie à l’entraînement, c’est-à-dire qu’on les prépare pour les courses auxquelles ils devront concourir. L’entraînement se fait non pas sur le lieu d’élevage, mais dans des écuries spéciales ordinairement situées à proximité des hippodromes de courses ; il exige d’immenses espaces et des terrains spéciaux qui ne soient ni détrempés par les pluies ni durcis par la sécheresse. Les immenses allées droites de la forêt de Chantilly avec leurs arbres taillés en berceau, dont la perspective indéfiniment décroissante s’étend jusqu’à l’horizon incertain, sont admirablement disposées pour les exercices préparatoires, et la verte pelouse du château est un des plus beaux hippodromes qu’on puisse voir. Aussi est-ce là qu’ont été établies les principales écuries de ce genre. Ce sont ordinairement des bâtimens rectangulaires, entourant complètement une cour de même forme et sur laquelle s’ouvrent les portes des différentes boxes ou cellules pavées dans lesquelles chaque cheval est laissé en liberté sur sa litière de paille. Dans le coin de la cellule sont le râtelier, la mangeoire, quelquefois même un bassin plein d’eau courante. Ces boxes sont tenues avec une grande propreté et quelques-unes même avec luxe. Chaque cheval a son lad spécial, un enfant de douze ou treize ans, qui couche avec lui, qui est chargé de lui donner tous les soins, et cette tâche est assez minutieuse pour absorber presque tout son temps.

Les chevaux réunis dans les boxes de Chantilly ont la peau si