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course, ils reçoivent leurs instructions de l’entraîneur, qui, connaissant à fond les qualités et les défauts du cheval, prescrit la manière dont il doit être conduit. Il ne suffit pas en effet qu’un jockey ait une bonne assiette, il faut qu’il ait un grand sang-froid et assez de tact pour tirer tout le parti possible de sa monture. Le point important est d’en ménager les forces, de manière à ce qu’elles ne soient pas épuisées au moment où un dernier effort pourrait lui assurer la victoire. Quant à la manière de s’y prendre, elles dépend du cheval qu’on monte et de ceux contre lesquels on lutte. Tantôt il y aura avantage à essouffler ses adversaires en s’élançant à ttoute vitesse, tantôt il vaudra mieux se tenir d’abord au dernier rang et prendre successivement la place de ceux qui commencent à faiblir.

Si les courses ne servaient qu’à montrer la vitesse de certains chevaux, elles ne mériteraient pas qu’on s’en occupât plus que d’un divertissement public ; mais il n’en est pas tout à fait ainsi, et pour peu qu’on examine les choses de plus près, on ne tarde pas à s’apercevoir que le résultat définitif est l’amélioration de la race chevaline. Nous avons vu en effet comment, par l’accouplement des meilleurs chevaux, on était arrivé à former une race dont les qualités dominantes sont la vitesse et l’énergie. Eh bien ! Les courses sont le moyen de reconnaître, parmi tous les chevaux de cette race qui naissent chaque année, ceux qui possèdent ces qualités au plus haut point et qui sont dès lors les plus aptes à les transmettre à leurs descendans.

Ainsi les courses en elles-mêmes n’ont aucune utilité réelle, elles n’en ont que comme moyen de distinguer les meilleurs parmi les chevaux de même âge, absolument comme les autres concours d’animaux producteurs. Elles sont constituées de façon à opérer artificiellement la sélection, à laquelle Darwin prétend que tous les animaux livrés à eux-mêmes sont soumis, de telle façon que la victoire finale reste aux plus vigoureux et aux mieux doués. Cette sélection s’opère sur une si grande échelle que, sur 100 poulains pur sans pris à leur naissance, on en trouve tout au plus 30 en état, à l’âge de trois ans, de se présenter sur hippodrome ; sur ces 30, 20 au moins sont, des chevaux très ordinaires, 9 des chevaux de troisième ordre, et un à peine devient un cheval de second ordre tel que Fille-de-l’Air ou Vermout, etc. Quant aux chevaux comme Eclipse ou Flying-Childers, Monarque ou Gladiateur on n’en rencontre pas un sur dix milles.

Les courses) d’ailleurs sont graduées de manière à ce que cette sélection s’opère successivement. Bien qu’on produise quelquefois sur le turf des chevaux de deux ans pour juger de leur force relative, c’est à trois ans seulement qu’ont lieu les épreuves décisives.