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cents guérilleros mexicains, déroba sa marche sous bois, dans l’espoir de trouver une occasion favorable. À la vue des précautions prises, il renonça à son projet d’enlèvement. Pourtant les difficultés immenses du trajet eussent dû l’amorcer, car les routes étaient complètement défoncées, les boues arrêtaient les chariots, et mille fois, surtout depuis le Chiquihuite jusqu’à Cordova, il fallut tripler les attelages pour les retirer des cloaques et des fossés où ils versaient. Le 21 août, le convoi entrait sain et sauf à Cordova, d’où la contre-guérilla redescendit vers la Soledad. À peine était-elle revenue à son ancien campement, que la nouvelle de la dévastation de Cotastla par les bandes de Tlaliscoya et de Passo-Santa-Anna parvint au colonel. L’alcade Dominguez avait pris la fuite, plusieurs fonctionnaires avaient été pendus, et les maisons des gens compromis étaient incendiées. Cotastla fut réoccupée aussitôt par deux compagnies de la légion étrangère. Après avoir fait le service d’escorte et de convoi jusqu’au 20 septembre, après avoir rendu bonne justice à plusieurs bandits tombés dans ses ambuscades, la contre-guérilla reçut l’ordre de quitter la Soledad pour s’établir au village de Camaron. Elle ne put laisser qu’un faible détachement au camp qu’elle allait quitter.

Les travaux du chemin de fer de Vera-Cruz à Mexico, tant de fois repris et abandonnés depuis dix ans, étaient l’objet de la préoccupation de l’autorité française, car de la rapidité de ces constructions dépendaient la facilité des transports nécessaires à l’armée et la salubrité des divers détachemens envoyés en terre chaude, ou à Vera-Cruz même, pour faire monter les convois jusqu’à Orizaba. Cette entreprise avait malheureusement rencontré d’immenses difficultés. Sans compter l’ardeur du soleil, les miasmes qui frappaient les travailleurs, les attaques continuelles des guérillas avaient plus d’une fois éloigné les bras des ateliers. Le plus grand obstacle du tracé venait au reste de la hauteur des berges du Jamapa, que la voie ferrée devait traverser près de la Soledad. Le tablier de l’ancien pont, brûlé par les libéraux, était en reconstruction, et au-dessus du nouveau tablier, destiné aux voitures et aux piétons, commençaient à se dresser les échafaudages nécessaires à la superposition d’un hardi viaduc. Les remblais s’étaient élevés à leur tour sur la rive droite, et les terrassemens de la Soledad au Chiquihuite avaient été entrepris. C’est alors que la contre-guérilla dut se rendre à Camaron, à 20 kilomètres de la Soledad, pour protéger les nouveaux chantiers. Elle s’y installa le 19 septembre.

Camaron ne comptait plus qu’une maison à longue façade, à rez-de-chaussée et à cour intérieure sur le côté droit de la route. C’est derrière les murs de cette maison que s’étaient abrités les libéraux