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III.

L’enquête demande quelles sont les causes qui depuis dix ans ont agi sur le cours des métaux précieux. Ces causes sont faciles à énumérer. Depuis dix ans, on a donné aux affaires industrielles et commerciales un essor inaccoutumé. Le chiffre du commerce extérieur, qui était au commerce spécial, importations et exportations réunies, de 3 milliards 615 millions en 1854, atteignait successivement 4 milliards 188 millions en 1857, puis 5 milliards 432 millions en 1861, et enfin près de 7 milliards en 1864, c’est-à-dire que dans cette période décennale il a doublé. Le résultat a été plus brillant encore pour le commerce intérieur; ce qui le prouve, c’est la progression des opérations de la Banque de France, qui en sont le reflet et pour ainsi dire le résumé. Ces opérations, de 2 milliards 541 millions en 1852, ont monté à 7 milliards 709 millions en 1862. Elles ont presque triplé, et il s’agit d’un commerce qui embrasse nos relations de chaque jour, et qui a beaucoup plus d’importance pour nous que le commerce extérieur. Pendant la période décennale précédente, l’augmentation du commerce extérieur n’avait pas dépassé 55 pour 100, et les opérations de la Banque de France n’avaient guère fait que doubler[1]. Ce développement industriel et commercial extraordinaire n’a pas été le privilège de la France; il a eu lieu également dans d’autres pays, et notamment en Angleterre. En 1854, le commerce extérieur de l’Angleterre représentait 268 millions de livres sterling, en 1863 444 millions de livres. Nous n’avons pas le chiffre du progrès du commerce intérieur il ne se résume pas, comme chez nous, dans les opérations de la Banque d’Angleterre; à côté de la Banque d’Angleterre, il y a un grand nombre d’autres établissemens de crédit qui, au moyen des ressources que leur fournissent les dépôts, escomptent comme elle, beaucoup plus qu’elle, du papier de commerce. Le chiffre des affaires réalisées par toutes ces banques s’est tellement accru, et le nombre des banques s’est tellement multiplié depuis quelques années, qu’on peut en induire facilement que le mouvement commercial intérieur de l’Angleterre n’a pas été inférieur à celui de l’extérieur. Or qu’a-t-il fallu dans les deux pays pour faire face à un tel développement d’affaires? Il a fallu

  1. Les chiffres étaient pour le commerce spécial, importations et exportations, de 2 milliards 179 millions en 1843, et de 3 milliards 443 millions en 1853. Quant aux opérations de la Banque de France, les chiffres sont de 1 milliard 82 millions en 1842 pour le principal établissement et ses succursales, et de 2 milliards 541 millions en 1851.