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province, celle de Canterbury ou celle d’York, peut bien embrasser les intérêts religieux du royaume, pourquoi il n’y aurait pas une convocation de toute l’église. Ce synode, tel qu’il est constitué, ne forme-t-il point d’ailleurs une représentation des évêques et des chapitres plutôt qu’une représentation du clergé ? — C’est pour répondre à cette dernière objection que la province de Canterbury a jugé utile d’étendre son suffrage électoral. Un ennemi est souvent plus redoutable à la porte que dans l’intérieur de la maison. On a voulu donner à l’église basse le moyen d’entrer dans ce concile et d’exprimer ses opinions en toute liberté. Se rendra-t-elle à cet appel ? C’est encore une question. D’ailleurs la minorité qu’elle enverra sur les bancs sera très loin de représenter l’état réel de ses forces. Quant au congrès ecclésiastique, church congress, le clergé de l’église basse y assiste et y prend même une certaine part, mais plutôt pour obéir à un sentiment de devoir que par enthousiasme. En vain a-t-on écarté de ces réunions les disputes de dogme et de croyance pour y substituer des questions pratiques, les low churchmen craignent autant l’action de l’église haute que ses doctrines. C’est ainsi que le clergé anglais trouve en lui-même, c’est-à-dire dans ses divisions, une barrière qui limite ses moyens d’influence. Chacun des deux partis compte d’ailleurs en Angleterre des hommes remarquables, chacun a eu dans ces derniers temps sa période de renaissance. La renaissance de l’église basse eut lieu à la fin du dernier siècle et au commencement de celui-ci ; à la tête du mouvement se placèrent entre autres le poète Cowper, Wilberforce, père du présent évêque d’Oxford, et Macaulay, père de l’historien. Le revival, comme disent les Anglais, de l’église haute se manifesta de 1830 à 1845 ; les principaux chefs étaient le docteur Pusey, l’ardent prédicateur Newmann, depuis converti au catholicisme, et le poète clergyman Keble. Leurs doctrines ont certainement gagné du terrain depuis quelques années en Angleterre, mais elles ne se sont point rattaché les sympathies des masses. L’église basse est, sinon la plus nombreuse, du moins la plus populaire, et celle vers laquelle penchent le plus souvent les faveurs du gouvernement libéral.

Quels sont donc alors les points essentiels sur lesquels se séparent ces deux opinions religieuses ? L’église haute reproche à l’église basse l’étroitesse de ses vues, son calvinisme bâtard, son inaction au milieu de la société, « Plutôt, lui dit-elle, que de vous asseoir au milieu des ruines et de pleurer sur les erreurs du temps, que ne vous levez-vous, et que n’essayez-vous d’améliorer votre siècle ? » L’église basse de son côté accuse ses adversaires d’obéir selon leurs goûts à deux tendances très opposées, l’une vers le catholicisme