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universel le 3 mai 1865, donne les résultats suivans pour l’exercice 1864. Il y avait en France, au 31 décembre 1864, 492 caisses d’épargne et 430 succursales. La fortune des caisses d’épargne, en y comprenant la dotation, la réserve, les dons et legs, les boni de toute sorte, s’élevait à 12,688,420 fr. 36 cent, pour 1,554,151 livrets. Les intérêts payés aux déposans, après avoir atteint le chiffre de 5 pour 100 en 1848, sont maintenant réduits à 4 pour 100, et personne ne peut avoir sur la caisse un crédit de plus de 1,000 fr. On a pensé, non sans quelque raison, que cette restriction ne gênerait personne : un ouvrier doit beaucoup travailler et beaucoup se priver pour amasser avec le secours des caisses d’épargne une somme de 1,000 fr. Il est presque vrai de dire que le plus grand service rendu par cette institution philanthropique a été un service de l’ordre moral. L’habitude prise de se contenir et de modérer ses dépenses est un bénéfice bien autrement important que l’acquisition de 30 ou 40 francs de revenu. Les caisses d’épargne ont d’ailleurs l’immense mérite d’avoir conduit à la mutualité, comme la mutualité a conduit à la coopération.

Les caisses de retraite pour la vieillesse, créées par la loi du 18 juin 1850, sont une extension importante de la législation des caisses d’épargne, puisqu’elles permettent de s’assurer, au moyen de versemens annuels, une rente dont le maximum peut, en vertu d’une loi postérieure[1], s’élever jusqu’à 750 fr. La loi a sagement permis aux déposans de stipuler le remboursement à leur décès du montant des sommes versées ; de cette manière, ils améliorent leur propre position sans déshériter leur famille. Elle a décidé dans le même esprit que les versemens faits pendant le mariage par l’un des deux conjoints profiteraient séparément à chacun d’eux par moitié. C’est surtout quand il s’agit de mutualité qu’on ne doit jamais perdre de vue les règles de la morale.

Personne ne pourrait assigner une date à la création des sociétés de secours mutuels. Sous l’ancien régime, les corporations étaient de véritables sociétés de secours mutuels, avec accompagnement de lois pénales et de privilèges, et les confréries d’ouvriers, nées du besoin de s’unir contre les patrons, avaient pour but ostensible la nécessité de secourir les malades et les orphelins. Plusieurs des sociétés modernes se rattachent à ces confréries par une filiation non interrompue, et l’on cite à Lille une société de malades qui remonte à 1580. Les sociétés de secours mutuels n’en sont pas moins en réalité une création de notre temps. A partir de la loi du 15 juillet 1850, la mutualité a pris sous cette forme une importance inattendue. 5,027 sociétés, 714,345 membres, 36,624,622 fr. 77 cent. de

  1. 7 juillet 1856, art. Ier.