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11 sh. 8 1/2 pence pour le fonds de réserve et 124 livres 13 sh, 10 1/2 pence pour ce que les sociétés coopératives appellent educational department, il restait à répartir un dividende de 2 sh. 5 pence (3 francs) par livre, c’est-à-dire 12 fr. pour 100 fr. (48 pour 100), si la même prospérité se soutenait pendant toute l’année.

Il semble en vérité que de pareils faits parlent assez haut. Nous n’en concluons pas que toutes les sociétés de consommation doivent partout produire le même résultat ; mais nous demandons qu’en présence d’un succès aussi incontestable et aussi complet on cesse de regarder la coopération comme une utopie. On disait autrefois en logique : ab actu ad posse valet consecutio, ce qui veut dire en bon français que la meilleure manière de prouver qu’on peut faire une chose, c’est de la faire. Eh bien ! voilà une société coopérative fondée, il y a vingt et un ans, par quarante tisserands ne possédant entre eux qu’une somme de 28 liv. ; elle a maintenant 4,747 membres et un capital qui s’élève à 1,380,539 fr. 25 c. Nous demandons à tout esprit sérieux si ce n’est pas là une démonstration irréfutable.

On dit : C’est une expérience qui a réussi à Rochdale, et qui ne réussirait pas ailleurs ; mais la société de Manchester et Salford réussit admirablement. Dira-t-on que le succès n’est possible qu’à… Rochdale et à Manchester ? Alors nous invoquerons la société d’Oldham, qui distribue cette année à ses acheteurs 34 fr. 40 c. pour 100 fr. Il faudra donc que l’on dise aussi que la société d’Oldham est une exception, comme celles de Rochdale, de Manchester et Salford. N’est-ce pas exagérer jusqu’au ridicule la manie du scepticisme ? Et pourquoi le système coopératif réussirait-il à Rochdale plutôt qu’ailleurs ? Qu’on en dise la raison. Il n’y en a pas, et il ne peut pas y en avoir. Oldham est une petite ville, Rochdale une assez grande ville, et Manchester une très grande ville. Elles n’ont d’ailleurs rien de particulier ; ce sont des villes manufacturières qui ressemblent de très près à toutes les villes manufacturières. On peut en dire autant de Leeds, dont la société coopérative, fondée en octobre 1846 (flour and provision society), ne le cède pas en importance à la société des équitables pionniers de Rochdale. La vérité est que ces sociétés et un très grand nombre d’autres ont réussi parce qu’elles ont été bien dirigées et bien organisées. Le chancelier des sociétés amicales (registrar of friendly societies) pour l’Angleterre et le pays de Galles seulement a examiné les règles de 1,054 sociétés nouvelles dans le cours de l’année 1863. Sur ce nombre, il y a sans doute beaucoup de sociétés de bienfaisances et de secours mutuels (les sociétés de crédit, loan societies, font l’objet d’un rapport séparé) ; mais il y a aussi beaucoup de sociétés de consommation proprement dites (for the purchase of coals