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aux subsides de l’état dans la proportion de 8 shillings par an et par enfant qui a satisfait à l’examen et qui a fréquenté régulièrement l’école. Les institutions fondées par les particuliers ont les mêmes droits en se soumettant aux mêmes obligations.

Autrefois l’Angleterre manquait d’établissemens pour former des instituteurs capables de remplir convenablement leur importante mission. Il n’y avait que deux écoles normales dignes de ce nom, celles de Battersea et de Borough-Road[1], et encore ont-elles langui aussi longtemps qu’elles n’ont eu à compter que sur les contributions volontaires. Il existe aujourd’hui 34 écoles normales en Angleterre et dans le pays de Galles. Le subside parlementaire couvre 60 pour 100 des frais, et c’est grâce à ce secours que la plupart se sont fondées et se soutiennent[2]. Au centre siège le conseil privé de l’éducation, constitué en vertu d’une patente royale en 1839. Ce conseil ne peut agir sur les établissemens privés et contribuer au développement de l’instruction que par les subsides qu’il accorde pour aider à construire des écoles et à payer ou encourager les maîtres. Les inspecteurs, qu’il nomme de concert avec les autorités ecclésiastiques des différentes communions, lui permettent de contrôler l’emploi des fonds qu’il accorde et de constater les progrès accomplis, mais non de diriger ou d’améliorer l’enseignement. Le seul moyen de contrainte dont il dispose est le retrait de son concours pécuniaire. Pour chaque école qu’il admet à participer au subside parlementaire, il faut un contrat dont les conditions sont librement débattues entre les fondateurs et le conseil. L’état agit donc par voie de bienfaits, non par voie d’autorité. Il intervient comme un philanthrope opulent qui conseille et secourt, non comme un souverain qui commande et impose.

On le voit, le système anglais constitue une transaction entre celui qui confie l’organisation de l’enseignement primaire aux pouvoirs publics et celui qui l’abandonne complètement à l’initiative des particuliers. Le parlement n’a pu aller plus loin, parce qu’il s’est trouvé arrêté par la jalousie des sectes dissidentes et par les appréhensions de l’église établie. La plupart des hommes qui s’occupent spécialement de cette question en Angleterre reconnaissent cependant que

  1. Pour tout ce qui concerne l’organisation de l’enseignement primaire en Angleterre, outre les travaux de M. Rendu, on peut consulter le livre plus récent de M. Reyntiens (1864), où tous les faits sont exposés avec une grande impartialité et d’après les documens officiels.
  2. Les catholiques eux-mêmes, qui ailleurs combattent l’intervention de l’état, la déclarent nécessaire en Angleterre, « Nous devons au concours de l’état, disait naguère le cardinal Wiseman, la possibilité de former de bons maîtres et l’organisation des écoles normales dont nous avons un si grand besoin. »