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lampe. Cet ouvrage se poursuivit l’hiver comme l’été durant quatre années et demie. Les ouvriers, étant vêtus de laine, ne sentaient guère le froid sous leurs habits de plongeur ; mais leurs mains, exposées au contact de l’eau, étaient quelquefois si engourdies qu’ils les frappaient avec le marteau sans même s’en apercevoir, et ne constataient la meurtrissure qu’après être remontés à la surface. Ce système de travaux par le scaphandre a été reconnu beaucoup plus économique et plus expéditif que l’ancienne méthode de la cloche.

Le diving-apparatus rend encore tous les jours de grands services à la navigation. Un vaisseau de guerre, le Howe, avait perdu son ancre et son câble ; un plongeur revêtu de l’appareil de M. Siebe descendit au fond de la mer, et au moyen d’une chaîne qu’il fixa à cette masse de fer, on put ramener l’ancre et le câble à bord. N’arrive-t-il pas aussi trop souvent que la coque d’un navire éprouve en mer des avaries sérieuses ? Grâce au scaphandre, un homme peut maintenant réparer sous l’eau les parties endommagées. C’est ainsi que le Great Eastern fut sauvé en revenant d’Amérique et put enfin atteindre le port de Liverpool. Lors du siège de Sébastopol, un bâtiment de guerre anglais, l’Agamemnon, qui se trouvait sous le feu des forts, fut frappé par une roquette au-dessous de la ligne d’eau, water-line. C’en était probablement fait du navire, quand le charpentier, recouvert de son armure de plongeur, alla reconnaître l’étendue du désastre, ferma la blessure et revint annoncer que tout était maintenant pour le mieux, all is right. Aussi les soldats de la marine britannique s’exercent-ils aujourd’hui à se servir du diving-apparatus.

Le scaphandre n’a point été appliqué avec succès qu’à la réparation des navires, il tient aussi un certain rang dans l’entretien des mines. Un accident était arrivé, il y a quelques années, aux houillères de Dearnley, près de Rochdale. La pompe s’était brisée, et l’eau avait envahi l’intérieur de la fosse à une hauteur considérable. Quand on croyait avoir porté remède au mal, on s’aperçut de nouveau que la machine fonctionnait avec peine. Il y avait évidemment, comme disent les Anglais, un écrou relâché quelque part, a screw loose somewhere ; la question était de savoir où. Sur ces entrefaites, la pompe se refusa entièrement à soulever les eaux vers la surface. L’ingénieur eut alors l’idée d’introduire une cloche à plongeur dans l’embouchure du puits. On envoya un émissaire à Liverpool, où se trouvait alors Ellis Javons, un diver qui s’était rendu célèbre en retrouvant les trésors d’un vaisseau naufragé. Il vint à Dearnley avec un autre camarade qui devait le seconder dans son entreprise. Ellis Javons n’était point un plongeur à la cloche, c’était un scaphandrier. Aussi est-ce équipé de l’habit imperméable et