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richesses exceptionnelles il faut ajouter des sources d’eaux minérales. Livingstone en visita une au nord-ouest de Tété ; l’orifice par lequel l’eau jaillissait avait un pied de diamètre ; tout autour était une multitude de petits trous qui servaient d’ouvertures supplémentaires. Des bulles d’air sortaient incessamment de l’orifice, et en éclatant émettaient une vapeur acre qui prenait à la gorge. Cette eau, qui donnait 70° de chaleur, contenait en dissolution un peu de sel qu’elle dépose, au profit des indigènes, sur le lit pierreux où elle coule.

Le 22 avril 1856, Livingstone, laissant à Tété son escorte de Makololos, s’embarquait sur le Zambèse pour retourner en Europe. Le 24, il atteignit les gorges de Lupata, formées par une chaîne de rochers qui s’est rompue pour donner passage au fleuve et ne lui laisse qu’une largeur de 250 mètres entre deux murailles de 700 pieds de haut. Après une navigation de quatre jours, il arrivait à Séna, seconde station des Portugais. C’est un pauvre village qu’un fortin mal entretenu ne parvient pas à protéger contre les entreprises des indigènes, qui viennent percevoir un tribut jusque sous ses canons rouillés. Le commandant est obligé de fermer les yeux sur leurs arrogantes prétentions, sachant que la compagnie de noirs qui est sous ses ordres s’enfuirait au premier coup de fusil. Au reste, le pays tout entier entre Tété, Séné et Quillimane a échappé à la domination des Portugais. Bien loin de leur être soumis, les indigènes les considèrent comme leurs tributaires, et prélèvent un droit de navigation sur chaque bateau qui remonte le fleuve. Le 11 mai, Livingstone reprit sa route par le Zambèse, qui reçoit sur sa rive gauche un affluent de première grandeur, le Shiré. Le fleuve était bordé de chaque côté d’une riche variété de plantes aquatiques parmi lesquelles dominait le macre ou la châtaigne d’eau. Le 20, il arrivait à Quillimane, sur la côte du Mozambique, d’où il s’embarqua le 12 juillet pour l’Angleterre. Cinq mois après, il se reposait dans le sein de sa famille et au milieu de ses amis.


VI

La géographie tient une grande place dans les préoccupations des Anglais ; ils en suivent la marche progressive et en enregistrent les triomphes avec un vif intérêt. Dominés par des tendances et des besoins qui ont leur origine dans la situation exceptionnelle de leur pays, l’on comprend quelle chaleureuse réception ils durent ménager à l’intrépide voyageur qui venait d’ouvrir un champ si vaste à leur activité. La Société royale de géographie, les associations religieuses, les corps savans l’accueillirent avec faveur et lui