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Julien contre le christianisme, les livres de Philon, la vie d’Apollonius de Tyane par Philostrate[1]. Enfin un savant commentaire a fixé la date des différentes séries des oracles sibyllins, œuvre en partie juive, en partie chrétienne, dont les apologistes chrétiens, dupes eux-mêmes de la fraude de leurs devanciers, invoquent très souvent le témoignage pour convaincre les païens de la vérité du christianisme. Il y a d’autres ouvrages apocryphes, d’un caractère tout différent, qui jouissaient auprès des pères de l’église d’une autorité au moins égale à celle des oracles sibyllins, et qui pourtant laissent encore aux érudits comme aux penseurs plus d’une question à résoudre : ce sont les livres qui portent le nom d’Hermès Trismégiste. Marsile Ficin, Patrizzi et les autres érudits de la renaissance qui ont traduit ou commenté ces livres n’hésitaient pas à les présenter, conformément à l’opinion de Lactance et d’autres docteurs de l’église chrétienne, comme des monumens de l’antique théologie des Égyptiens. On regardait alors Hermès comme une sorte de révélateur inspiré, un peu antérieur à Moïse, et ses écrits comme la source première des initiations orphiques, de la philosophie de Pythagore et de celle de Platon. Des doutes néanmoins ne tardèrent pas à s’élever, et les progrès de la critique firent classer les livres hermétiques parmi les dernières productions de la philosophie grecque. Casaubon les attribua même à un juif ou à un chrétien. L’auteur du Panthéon Ægyptiorum, Jablonski, crut y reconnaître l’œuvre d’un gnostique. Enfin Creuzer et son savant traducteur, M. Guigniaut, inclinent à penser qu’au milieu des idées alexandrines qui forment le fond des livres hermétiques on peut trouver quelques traces des dogmes religieux de l’ancienne Égypte.

Dans un travail récent où l’état de la question est exposé avec beaucoup de clarté, M. Egger émet le vœu qu’un philologue exercé publie une bonne édition de tous les textes d’Hermès en les accompagnant d’un commentaire[2]. Ce vœu a déjà été en partie réalisé. M. Parthey a publié à Berlin une édition excellente des quatorze morceaux dont on possède le texte grec complet. Il les réunit, comme on le fait ordinairement, sous le titre de Pœmander[3] ; mais ce titre, selon la remarque de Patrizzi, ne convient qu’à un seul d’entre eux, celui que les manuscrits placent le premier. Il existe de plus un long dialogue intitulé Asclèpios, dont nous ne possédons qu’une

  1. Voyez sur Apollonius la Revue du 1er octobre 1865.
  2. Des livres attribués à Hermès Trismégiste (Mémoires de littérature ancienne), 1862.
  3. Hermetis Trismegisti Pœmander, Berlin, 1854. — Il faudrait conserver la forme grecque Poimandrès. Comme le fait remarquer M. Egger, Pœmander répond au grec Poimandros, et non à Poimandrès.