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à la science vraie ; il est un dans tous. C’est pourquoi nos ancêtres lui attribuaient toutes les découvertes et mettaient leurs œuvres sous le nom d’Hermès. » De là cette prodigieuse quantité de livres ou discours attribués à Hermès. Jamblique parle de vingt mille, mais sans donner le titre d’un seul. Les quarante-deux livres dont parle Clément d’Alexandrie constituaient une véritable encyclopédie sacerdotale. Selon Galien, les prêtres écrivaient sur des colonnes, sans nom d’auteur, ce qui était trouvé par l’un d’eux et approuvé par tous. Ces colonnes d’Hermès étaient les stèles et les obélisques qui furent les premiers livres ayant l’invention du papyrus. Selon Jablonski, le nom de Thoth signifie colonne en égyptien. Il est malheureux pour la science qu’au lieu des livres mentionnés par Clément d’Alexandrie et de ceux où, selon Plutarque, étaient expliqués les noms des dieux, nous n’ayons que des œuvres philosophiques d’une époque de décadence. Cependant les livres hermétiques que nous possédons ont aussi leur valeur relative. Ils nous font connaître la pensée religieuse de l’antiquité, non pas sous sa forme la plus belle, mais sous sa dernière forme. Pour exposer l’ensemble de la théologie hermétique, je ne puis mieux faire que de reproduire le résumé que M. Vacherot en a donné dans son Histoire critique de l’école d’Alexandrie. « Dieu, dit-il, y est conçu comme un principe supérieur à l’intelligence, à l’âme, à tout ce dont il est cause. Le bien n’est pas un de ses attributs, c’est sa nature même ; Dieu est le bien, comme le bien est Dieu. Il est le non-être en tant qu’il est supérieur à l’être. Dieu produit tout ce qui est et contient tout ce qui n’est pas encore. Absolument invisible en soi, il est le principe de toute lumière. Dieu est la vie universelle, le tout dont les êtres individuels ne sont que des parties ; il est le principe et la fin, le centre et la circonférence, la base de toutes choses, la source qui surabonde, l’âme qui vivifie, la vertu qui produit, l’intelligence qui voit, l’esprit qui inspire. Dieu est tout, tout est plein de lui ; il n’est rien dans l’univers qui ne soit Dieu. Tous les noms lui conviennent comme au père de l’univers, mais, parce qu’il est le père de toutes choses, aucun nom n’est son nom propre. L’un est le tout, le tout est l’un ; unité et totalité sont des termes synonymes en Dieu. »

La première idée qui s’offre à l’esprit quand on étudie cette philosophie est de la rapprocher de celle des brahmanes. En comparant les livres hermétiques avec le Baghavat-Gita, on voit souvent les mêmes idées se présenter sous des expressions presque identiques ; mais comme il n’y a pas de preuves positives d’une communication entre l’Inde et l’Égypte, on ne peut expliquer ces analogies par des emprunts. Il est seulement curieux de trouver, chez des peuples différens, les mêmes doctrines à côté des mêmes