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REVUE DES DEUX MONDES.

Dans les n° 58 de Saint-Germain (avant-dernier feuillet) et 3595 de l’ancien fonds, fol. 22, se trouve joint à d’autres ouvrages de Joachim un opuscule sans titre et sans nom d’auteur, sous forme de tableau synoptique, et commençant par ces mots : Helyas jam venit, et non cognoverunt cum. C’est l’exposé de toute la philosophie de l’histoire de Joachim rapportée symboliquement à l’ouverture des sept sceaux de l’Apocalypse. Frà Salimbene le cite sous le titre de « Livre des Figures »[1]. On peut l’identifier aussi au De septem sigillis, mentionné par Trithème et par d’autres comme un ouvrage de Joachim. La fin du Nouveau Testament y est fixée à l’an 1260. Alors apparaîtra Élie, et l’église romaine, qui aura été détruite par l’empereur, sera rétablie ; Le dernier pape nommé dans cet opuscule est Innocent III, qui régna de 1198 à 1216. L’auteur ne semble cependant employer aucun artifice pour faire croire qu’il est Joachim.

Frà Salimbene déclare avoir reçu, à Hyères, du grand joachimite Hugues de Digne, et avoir copié à Aix, pour Jean de Parme, un commentaire de Joachim sur les quatre Évangiles[2]. Je n’ai trouvé nulle part aucune autre trace de cet écrit[3], certainement supposé.

La Glose sur les Prophéties de Cyrille, imprimée à Venise en 1517, et dont il existe plusieurs manuscrits, est aussi une œuvre évidemment apocryphe. Les prophéties sur les papes, attribuées à Joachim, qui jouirent au moyen âge d’une si grande popularité, méritent encore moins d’être discutées. Une fois le rôle de prophète attribué à l’abbé de Flore, son nom devint le couvert à l’abri duquel se placèrent ceux que l’enthousiasme et la politique engagèrent à prédire l’avenir. Un même sentiment paraît inspirer les auteurs de ces singulières compositions et donne une grande unité aux œuvres apocryphes de Joachim : c’est la haine de la cour de Rome assimilée à la courtisane de l’Apocalypse, du pape identifié avec l’ante-christ, de l’empereur présenté comme l’oppresseur de l’Italie. Tout décèle la main d’une secte dominée par une pensée de réforme pro-

  1. P. 85,124,224.
  2. P. 124,125.
  3. Voir cependant Acta SS., I. c, p. 103.