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REVUE. — CHRONIQUE.

lienne. Le plan de campagne de l’Italie, si l’on en peut juger par les différentes attaques entreprises ou préparées, était hardi et sérieux. Il devait y avoir quatre attaques à peu près simultanées : celle du Mincio par l’armée du roi, celle du Pô par le général Cialdini, celle du Tyrol par les volontaires garibaldiens, celle de Venise et du Frioul par la flotte de l’amiral Persano. Si l’armée du roi eût pu s’établir au-delà du Mincio, il n’est guère douteux que le général Cialdini n’eût réussi à traverser le Pô, et alors on eût vu converger avec énergie vers le foyer des forces autrichiennes tous les efforts des armées de terre et de mer de l’Italie. L’effet de l’échec de Custozza a été de retarder cette grande tentative d’irruption simultanée. Elle peut être reprise prochainement. Pour notre part, nous conseillerions aux Italiens de ne point apporter de précipitation téméraire dans leur prochain essai d’offensive. Malgré l’insuccès, ils ont obtenu l’estime de leurs adversaires, et ils ont donné à leurs amis la conviction qu’ils sont capables de tenir tête à l’Autriche sans avoir besoin de réclamer un concours étranger ; la prudence ne leur conseille-t-elle point d’attendre, pour engager une nouvelle opération grave, que les événemens militaires aient pris en Allemagne une tournure plus décidée ?

On ne peut nier que les débuts de la campagne n’aient été en Allemagne favorables à la Prusse. M. de Bismark semble avoir communiqué aux mouvemens de l’armée prussienne quelque chose de la brusquerie tapageuse et téméraire de sa politique. Dès l’entrée de jeu, la Prusse a mis la main sur le Hanovre et l’électorat de Hesse, et a ainsi établi et assuré une communication continue entre ses provinces rhénanes et le corps de la monarchie. Elle s’est en outre emparée, par une rapide promenade militaire, de la Saxe, qui ne lui a été disputée ni par l’armée saxonne ni par les Autrichiens. Le profit de l’alliance de la Saxe au point de vue stratégique a été perdu ainsi pour l’Autriche. Cette puissance a par là renoncé à l’un des points d’attaque les plus redoutables auxquels la Prusse fût exposée, et la Prusse, de son côté, s’est trouvée en possession de toutes les commodités de l’offensive. Que l’occupation de la Saxe par la Prusse soit un fait défavorable à l’Autriche, c’est incontestable. Il n’est cependant point difficile de pressentir les causes qui ont forcé l’Autriche à laisser cet avantage au moins apparent et temporaire à son ennemi.

L’Autriche a dû compter, pour la résistance aux agressions de la Prusse à l’ouest, sur le concours de l’armée fédérale. C’est un succès politique pour elle d’avoir obtenu contre la Prusse l’alliance des états importans de la confédération de l’ouest et du sud et les décisions légales de la diète ; mais le bénéfice militaire du concours fédéral n’a pu se faire sentir aussi vite. On sait combien les contingens fédéraux ont été lents à se réunir, et on a pu craindre un instant que le prince Alexandre de Hesse ne fût point en état de protéger la capitale de la confédération, Francfort, contre une insulte prussienne. Une autre conséquence pénible de la lenteur des fédéraux a été la capitulation de la petite armée hanovrienne, qui, malgré la