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Et encore ces imperceptibles différences étaient-elles bien dignes de l’attention de la critique? Assurément non. C’était d’abord la rectification de la signature des deux premières lettres, signées par négligence, au premier tirage, Marie-Antoinette à cause de la dénomination vulgaire, et qu’on eût dû signer seulement du second nom comme aux originaux. Rien de fixe en effet dans la signature de cette princesse, qui signait même parfois non plus Marie-Antoinette-Josèphe-Jeanne, comme sur son acte de mariage, non plus Marie-Antoinette, comme depuis ce mariage, ou bien Antoinette tout court, comme dans beaucoup de ses lettres jusqu’en 1780, mais Antoine, ainsi que cela résulte d’une lettre de notification de son mariage à sa sœur Amélie, duchesse de Parme[1]. C’était ensuite le rétablissement du vrai texte de quelques lettres de Mme Elisabeth, imprimées d’abord sur un cahier de copies dont m’avait gratifié à Vienne le comte Henri de Bombelles, gouverneur des archiducs. Le comte tenait dans ses mains les originaux en me remettant, à l’ambassade de France, ces copies, que je devais croire littérales, mais qui malheureusement avaient été tronquées, comme la correspondance publiée par le comte Ferrand. Quand on reçoit une chaîne d’or en présent, il ne faut pas, comme l’Arétin, commettre l’impertinence de la peser; j’aurais eu mauvaise grâce à demander de collationner hic et munc ces lettres. Mais j’avais pu depuis les rectifier et compléter mot à mot à Paris, au moyen des autographes entrés dans les papiers de famille du marquis de Castéja, et j’en avais avisé le lecteur, page viii de la préface de mon troisième volume. Le fait était acquis à la notoriété, à quoi bon alors relever ce détail?

Ce n’est pas tout. Trop occupé par mes fonctions publiques et par des travaux en cours d’exécution pour avoir encore recueilli et commenté toutes les pièces qui devaient concourir à l’ensemble de mon recueil de Louis XVI, Marie-Antoinette et Mme Elisabeth et pour avoir achevé une longue étude diplomatique et maritime que je méditais sur ce règne, je n’étais pas prêt à livrer ce recueil à la presse, quand M. d’Hunolstein publia son volume. J’avais ignoré jusque-là l’existence entre ses mains de tant de lettres de l’infortunée reine. L’alarme me prit, je dus craindre qu’au moyen de ses propres pièces et de communications étrangères il ne me fît perdre le fruit de mes efforts et recherches de vingt années, je me mis sur-le-champ à l’œuvre pour prendre date. En moins de

  1. Cette lettre, qui n’est point autographe, pas même la signature, est cependant originale, car elle est revêtue du cachet de la dauphine. Les archives royales de Parme, où elle est déposée, ont bien voulu en relever pour moi un fac-simile, qui jouera tout à l’heure un rôle important dans la question d’authenticité des écritures de Marie-Antoinette.