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accuser mieux les contours, de les mettre un peu plus à l’échelle, et d’en marquer les divisions par des groupes de sculptures moins monotones et moins insignifians.

La froideur de cette décoration superposée à la corniche est d’autant plus choquante qu’elle vient se heurter à ces énormes pavillons et aux sculptures non moins énormes sous le poids desquelles ils semblent succomber. Ici la scène change : nous gémissions d’un excès de maigreur, nous voici en présence de l’embonpoint le plus extraordinaire et le plus gigantesque qui se puisse imaginer. Il n’y a personne qui n’en dise son mot. Les moins experts, les plus indifférens, tous ceux qui traversent la place, sont sous le coup du même étonnement. Ils s’expliquent plus ou moins ce qui les trouble, ce qui les choque, mais tous ils s’aperçoivent qu’il y a là quelque chose d’insolite, un luxe sans raison, un défaut d’harmonie, une disproportion manifeste entre l’échelle de la parure et celle du monument. Ne parlons même pas de ces colonnes accouplées qui flanquent ces pavillons, et dont l’office est une énigme. À quoi bon essayer de comprendre ce qu’elles font là, ne portant rien, et si fort en saillie qu’elles sont comme étrangères à la construction ? Sont-ce des contre-forts ajoutés après coup et déguisés comme on a pu sous forme de colonnes ? sont-ce vraiment des colonnes, et alors quelle étrange idée de les avoir ainsi placées en dehors du fardeau qu’elles devraient soutenir ? On se rappelle qu’à leur début, lorsqu’elles virent le jour pour la première fois, elles étaient surmontées par des groupes d’enfans à peu près dans le genre de ceux qui entrecoupent la petite balustrade dont nous parlions tout à l’heure. Ce :, fûts robustes, ce double étage de supports herculéens sans autre fin que de porter une poignée de Myrmidons, donnèrent naissance à tant de quolibets qu’un erratum fut jugé nécessaire. À peine sortis de leur prison, à peine délivrés de leurs échafaudages, ces pavillons furent de nouveau claquemurés et emmaillottés ; puis au bout de six mois, quand la correction fut faite et livrée aux regards, les enfans avaient disparu, mais à leur place qu’avait-on mis sur chaque paire de colonnes ? Deux consoles renversées, deux consoles la tête en bas, expédient singulier, énigme encore plus insoluble que les petits génies, et dont pourtant, de guerre lasse, faute de mieux, crainte de pis, on s’est prudemment contenté.

Après tout, ces colonnes n’ont d’autre tort que d’être mal placées : elles sont parfaitement inutiles, et voilà tout ; du reste par elles-mêmes sans vice ni vertu. Nous ne saurions en dire autant de la décoration qui surmonte ces mêmes pavillons, ou plutôt seulement quatre d’entre eux, ceux dont la toiture se dessine en cône