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mèrent de ce projet d’évacuation partielle et graduelle. Il leur semblait périlleux d’affaiblir notre armée au moment où les forces relatives et l’audace de nos adversaires allaient être augmentées par notre retraite, et d’attirer peut-être ainsi sur nos derniers bataillons tout l’effort de l’ennemi. La question du départ était d’ailleurs dominée par l’intérêt de l’état politique où nous laisserions le Mexique. L’empereur Maximilien persisterait-il seul dans l’entreprise où il nous a suivis, et où il est manifeste aujourd’hui qu’il n’a pu nous rendre aucun service ? ou bien renoncerait-il à l’aventure et reviendrait-il en Europe avec nous ? Dans le cas d’une abdication de Maximilien, pouvions-nous quitter le Mexique avant d’avoir donné à ce triste et malheureux pays le temps d’organiser un gouvernement à sa guise, avec lequel il nous fût permis de négocier et d’établir les relations futures de la France ? Pour être résolues de la façon la moins fâcheuse, on se convaincra, avec un peu de réflexion, que ces diverses questions doivent être tranchées simultanément. Il faut savoir si Maximilien reste ou s’en va, et il faut, pour que la sécurité et la dignité de notre armée soient sauvegardées, que le rapatriement de nos troupes s’accomplisse non successivement, mais en une seule fois. Ce sont évidemment le pressant examen et la solution catégorique de ces questions que l’empereur confie au général de Castelnau en l’envoyant au Mexique chargé d’une mission pénible sans doute, mais dont les résultats peuvent servir grandement les intérêts de la France.

L’important dans cette opération difficile de la fin de notre expédition, c’est de couper court au mal et de ne point laisser traîner les choses. Pour nous, qui n’avons point confiance dans l’implantation au Mexique d’une dynastie impériale, nous voudrions que l’empereur Maximilien prît le parti de la retraite. En tout cas, il est à désirer que l’armée française, pour se retirer dans la plénitude de sa force, se concentre à Mexico et descende en masse vers le littoral. Le point d’honneur militaire et l’intérêt que nous avons à occuper le second port du Mexique nous obligeront sans doute à reprendre Tampico. Maîtres de la Vera-Cruz et de Tampico, nous pourrons organiser l’embarquement simultané de nos soldats et retenir d’ailleurs les deux villes maritimes les plus importantes du Mexique jusqu’à ce que nous ayons pris les arrangemens nécessaires avec le nouveau gouvernement. Si l’on ne perd pas de temps, comme nous avons, devant nous la saison favorable, la marche de nos trompes vers les ports du golfe et leur embarquement pourraient avoir lieu dans l’espace de six mois. Pour en finir d’un seul coup avec cette mésaventure mexicaine, le gouvernement, agirait sagement s’il réglait la question financière, en même temps que les questions politique et militaire. Tout le monde sait que des emprunts ont été émis en France par l’empereur Maximilien. Les porteurs de ces fonds sont presque tous Français. Ils n’ont reçu aucune garantie de l’état en France ; ils n’ont en conséquence aucune réclamation légale à faire valoir contre le gouvernement. Cependant, si l’on se plaçait sur le terrain de l’équité, il paraîtrait