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étudier la vraie nature de ces garanties et des conditions d’un vrai régime constitutionnel, et on ne peut pas dire que ce livre d’autrefois soit devenu inoppertun, pas plus pour la France, qui n’a pas tout ce qu’elle désire, que pour l’Italie, qui peut y trouver les moyens d’affermir et de féconder ce qu’elle a conquis.


CHARLES DE MAZADE.



HISTOIRE DE LA RÉPUBLIQUE DES ETATS-UNIS.
depuis l’établissement des premières colonies jusqu’à l’élection du président Lincoln, par M. J. P. Astié ; 2 vol. in-8o.


Le spectacle que nous a donné l’Amérique du Nord a dépassé en grandeur ce que ses plus chauds partisans avaient rêvé pour elle. Dans cette guerre civile, où les passions les plus violentes se sont donné pleine carrière, les libertés qui pouvaient le plus enrayer la marche du gouvernement, la liberté de la presse, celle de la parole et le droit de réunion, ont été respectées. Cette conduite est sans précédens dans l’histoire. Il était réservé aux États-Unis de montrer au monde comment l’on sort d’un conflit qui a remué jusque dans ses fondemens la nation tout entière et changé les conditions sociales et domestiques, d’une fraction considérable du pays. Quel est le régime qui a pu donner aux États-Unis un tempérament si robuste ? d’où vient cette force qu’une si rude secousse n’a pu abattre ? Ce ne sont pas ces millions d’émigrans qui depuis plus d’un quart de siècle affluent de toutes les contrées anglo-germaniques vers ce pays, multitude hétérogène, ignorante, sans idées politiques, sans autre pensée que de se créer un bien-être matériel. Ces millions n’ont fait que déposer dans le sein de la société américaine un élément de désordre, et ils auraient pu en amener la décomposition, si cette société n’était pas fortement ancrée sur un fond solide et ne possédait pas une puissance extraordinaire d’assimilation. Cette force de cohésion, cette capacité d’absorption que rien ne peut détruire, les États-Unis la doivent aux principes qui ont présidé à leur naissance. Jamais autant d’élémens moraux et religieux n’avaient concouru à la création d’une société. La grande époque de la réforme y avait déposé son levain le plus actif. M. de Tocqueville l’a dit, c’est l’origine qui donne la clé des institutions et des mœurs des Américains. Pour s’en convaincre, il suffit de lire l’histoire de M. Astié ; il y décrit avec une lenteur que l’importance du sujet justifie les nombreux matériaux qui sont entrés, dans les premières assises de cet édifice, et qui en expliquent la solidité et la grandeur.

Les émigrans qui fondèrent les colonies de la Nouvelle-Angleterre, dont le Massachussett est le centre et Boston le chef-lieu, ne traversèrent pas l’Atlantique pour se créer un bien-être que leur refusait la patrie. Des motifs d’une autre nature les animaient. Ils cherchaient une terre où ils pussent jouir d’une pleine liberté religieuse et réaliser l’idéal qu’ils s’étaient