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de cuivre revêtu d’un morceau de drap, sur lequel on étend une feuille de papier blanc enroulée et collée aux deux bouts avec de la gomme. L’horloge fait mouvoir le rouleau, mais elle agite en même temps une tringle voyageuse armée d’un double système de pointes. L’une de ces pointes marque les secondes, et au moyen de fils galvaniques se trouve en communication avec l’horloge astronomique, transit-dock, qui est réglée elle-même par la mécanique céleste. L’autre pointe marque le passage des astres, et au moyen d’un autre fil magnétique est mise en rapport avec la clé d’ivoire attachée près de l’oculaire des grands télescopes qui se trouvent dans d’autres salles et dans d’autres départemens de l’observatoire. Le transit-circle, l’altazimuth et l’équatorial communiquent ainsi avec le chronographe, et une étiquette indique ceux de ces instrumens qui sont pour le moment à l’ouvrage.

Il nous sera maintenant facile de saisir la signification des bruits que nous avons entendus ailleurs. Un simple attouchement du doigt et un courant électrique font aussitôt mouvoir à distance une des dents du chronographe qui, pareille au crochet du serpent, imprime à l’instant même une morsure sur le rouleau de papier mouvant. Lorsque je visitai cet appareil, il était dix heures du matin, et la feuille blanche collée autour du tambour était encore toute chargée du travail de la nuit. C’étaient de petits trous alignés de distance en distance et semblables à ceux que graverait en pareil cas la pointe d’une épingle : or chacune de ces légères perforations représentait le passage d’une étoile ou d’une planète que l’observateur avait en quelque sorte piquée au vol. On détache ensuite du tambour cette page hiéroglyphique de l’histoire du ciel, écrite nuit par nuit au moyen de l’instrument, et on la livre aux assistans pour être réduite par des calculs. A l’aide de tels matériaux et pour ainsi dire d’un tel journal se publie tous les ans un gros volume d’observations[1]sur le soleil, la lune et tous les corps mouvans du système solaire.

La nature des instrumens, le choix des astres surveillés, le caractère des problèmes résolus, tout montre assez que l’observatoire de Greenwich a surtout en vue les intérêts de la marine. Le même ordre d’études ne devait-il point naturellement s’étendre à la géographie physique ? C’est le ciel qui nous a appris à mesurer la terre. De tout temps, on a eu recours à l’observation des astres pour découvrir les dimensions et la figure de notre globe, les élévations et les dépressions de sa surface, ainsi que la distance exacte d’un lieu à un autre. Grâce à des travaux antérieurs, tous ces faits sont

  1. Observations of the royal Observatory, Greenwich.