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ces appareils ont appris à écrire. Qu’on leur donne une feuille de papier photographique, et ils la couvriront en un temps donné de leurs propres observations. Ils travaillent toute la semaine et même le dimanche, comme pour décharger la conscience des Anglais. Ce jour-là, on retire de dessous les cylindres les épreuves négatives, qu’on place dans un cabinet noir, et où elles attendent jusqu’au lundi le procédé ordinaire qui doit en faire jaillir l’impression. On leur substitue des feuilles blanches, et tout le reste est l’affaire des instrumens[1]. J’ai vu moi-même ces lignes tracées sur le papier ; elles sont vraiment d’une netteté admirable et elles indiquent bien par leurs zigzags les moindres déviations du magnétisme terrestre ou des divers agens de l’atmosphère. On a ainsi devant les yeux l’histoire des élémens rédigée par eux-mêmes.

Comme, au moment où je visitai l’observatoire magnétique et météorologique de Greenwich, le choléra venait d’éclater à Londres, j’étais naturellement curieux de savoir si l’on avait saisi dans l’air quelques traces d’altération. L’astronome royal me fit observer entre les arbres du parc un brouillard bleu assez épais qui semblait ramper de terre et s’élever vers le feuillage, où il se dissipait par degrés. Ce fait curieux, sur lequel M. Glaisher avait appelé depuis quelques jours l’attention du monde savant, coïncidait avec un phénomène tout semblable qu’il avait remarqué en 1854 lors d’une autre invasion de l’épidémie. Le plus singulier est que les brouillards ordinaires se dissipent sous une certaine pression du vent ; depuis environ une semaine, le vent avait soufflé avec une force plus que suffisante, et le brouillard rebelle était resté, colorant en bleu les murs du parc. M. Glaisher ajouta que l’instrument destiné à recueillir l’électricité n’en donnait presque plus depuis l’apparition du fléau. A part ces faibles indices, qui donnent pourtant à réfléchir, rien n’annonçait un changement dans l’état général de l’atmosphère.

Un autre sujet d’études, sur lequel s’est dirigée depuis quelques années l’attention des savans de Greenwich, est la formation des tempêtes. De 1841 à 1857, cent soixante-dix orages magnétiques ont été analysés, et un instrument sert à connaître les courans spontanés qui traversent la surface intérieure de notre planète. Deux fils, l’un partant de Croydon et l’autre de Dartford, se rendent dans l’intérieur de l’observatoire après avoir touché la terre aux deux extrémités, quoique parfaitement isolés dans toute leur longueur. La lumière d’une lampe tombe sur chacun de ces appareils, renfermés dans une caisse ; elle frappe d’abord une lentille cylindrique à axe vertical, et au moyen d’un rouleau d’ébène couvert d’un

  1. Les épreuves photographiques sont ensuite recueillies, multipliées à l’aide d’un procédé inventé par M. Glaisher, puis reliées en volumes.