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comparable à la grotte du Chien près de Naples, avec cette différence que la température y est beaucoup plus élevée et le dégagement d’acide carbonique plus considérable. Le niveau de l’ouverture dépasse d’un mètre environ celui du fond de la grotte, de telle sorte qu’on y peut entrer et y stationner, à la condition de rester debout, la tête au-dessus de la couche asphyxiante. L’acide carbonique, dont le pouvoir réfringent est supérieur à celui de l’air, est, grâce à cette circonstance, parfaitement visible. On le voit couler comme un liquide du fond de la cavité vers l’entrée et s’épancher au dehors le long des flancs du ravin.

Il était intéressant de rechercher quelle influence avait exercée l’éruption de Santorin sur ces émanations d’origine volcanique. On ne possède malheureusement que peu de renseignemens sur le degré d’activité antérieur de ces évens de la soufrière de Sousaki. On peut néanmoins affirmer qu’il ne s’est produit récemment en ce lieu aucun phénomène intense ; ceux que j’y ai observés m’ont paru la continuation régulière de ce qui a été vu, il y a plusieurs années, par les rares voyageurs qui ont visité cette région. Aucun mouvement remarquable du sol, aucune élévation notable de température, aucune sortie nouvelle de gaz ou de vapeurs, aucune recrudescence sensible dans les phénomènes volcaniques habituels de la contrée, ne s’y sont récemment produits comme contre-coup de la poussée éruptive qui s’exerçait au même moment avec tant d’énergie à l’extrémité méridionale des Cyclades. Il n’est pas douteux cependant qu’un même déchirement de l’écorce terrestre a donné naissance aux principaux centres volcaniques de la Grèce. Il faut donc admettre que le sillon commun d’implantation sur lequel sont assis Santorin et Sousaki est assez obstrué pour que toute communication à une faible profondeur soit interceptée entre ces deux points.

Un exemple plus frappant encore de cette obstruction partielle des conduits souterrains qui relient les centres éruptifs de la Grèce nous est offert par la presqu’île de Méthana. Tout y porte la trace de bouleversemens violons et de manifestations ignées des plus intenses, aujourd’hui presque assoupies. La partie septentrionale est couverte de blocs d’une roche volcanique, le trachyte, vomis dans des convulsions anciennes. Ces blocs tantôt s’élèvent à une grande hauteur sous la forme de pics noirâtres, tantôt s’étendent vers la mer comme des coulées de lave. Deux ou trois villages apparaissent au milieu des rochers, et le sol est cultivé avec soin partout où la décomposition des trachytes fournit un peu de terre végétale. Dans l’endroit le plus abrupt, au pied des falaises, se trouve une source sulfureuse que les anciens connaissaient, et où ils avaient même installé des bains qui sont abandonnés depuis bien des siècles. Il y reste encore quelques pans de murs et d’autres débris de constructions. L’eau de la source est alcaline et possède une température de 31 degrés. Il s’en dégage des bulles d’un gaz dont j’ai fait sur place une analyse rapide. Ce gaz est de l’acide carbonique