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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 avril 1867.

L’affaire du Luxembourg aura été une des plus curieuses surprises de la politique accidentée de notre temps. Il parait que la politique est comme le système céleste, elle a ses nébuleuses : l’affaire du Luxembourg est sans contredit une nébuleuse. Le langage dont s’est servi le ministre des affaires étrangères ; M. de Zuylen de Nyevelt, dans son discours à la chambre néerlandaise nous autorise à la qualifier ainsi, car l’honnête homme d’état est revenu sans cesse sur le caractère nuageux de la transaction qu’il s’efforçait d’expliquer. « La question, a-t-il dit, était enveloppée d’un nuage. Des pourparlers étaient engagés en plusieurs lieux ; mais non entre personnes accréditées. J’ose le demander, cet état nébuleux de la négociation n’était-il point de nature à faire naître des malentendus ? N’était-il pas à craindre qu’une transaction qui avait pour objet principal, sinon exclusif, de consolider la paix n’eût précisément une conséquence opposée ? » L’excellent M. de Zuylen a donc voulu crever le nuage. Il y a réussi en s’adressant au magicien de Berlin. Il a informé M. de Bismark du projet de cession du Luxembourg à la France, lui proposant les bons offices et le concours intermédiaire de la Hollande au cas où ce projet devrait donner lieu à des négociations entre la France et la Prusse. L’intervention officieuse du gouvernement néerlandais a été sur-le-champ déclinée par le ministre prussien ; mais grâce aux interpellations du gouvernement fédéral, à l’initiative de M. Bennigsen revendiquant le Luxembourg au nom de la nationalité allemande, aux déclarations de M. de Bismark, l’affaire luxembourgeoise est sortie du brouillard, et a fait le bruyant éclat qui a ému la France et mis l’Europe en sursaut.

Comment est donc survenu cet incident qui, sans avoir été l’objet de négociations écrites entre gouvernemens, issu de simples pourparlers entre personnes non accréditées, a placé la France, la Prusse et la Hollande dans des situations respectives si extraordinaires ? On peut juger là, par un