Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 68.djvu/1047

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

complet, quant aux données qui permettraient de mesurer et d’apprécier la campagne des travaux de Paris, que les mémoires du préfet de la Seine et les rapports de l’honorable M. Devinck sur les budgets de la ville.

Nulle part ne sont consignés les chiffres qui pourraient faire connaître l’Importance des engagemens contractés par la ville et la somme des capitaux appliqués aux travaux en une année. Ce n’est qu’indirectement qu’on obtient quelques élémens d’évaluations approximatives. Le compte-rendu périodique des émissions de l’institution du Crédit foncier est le seul témoignage statistique d’après lequel on se puisse faire une idée de l’œuvre poursuivie par M. le préfet de la Seine. Ces documens sont peu lus du public, et bien des gens ont été stupéfaits en apprenant que le Crédit foncier avait émis, depuis le commencement de 1866, des obligations communales pour une somme d’environ 290 millions, laquelle a dû couvrir une somme égale dépensée dans les travaux de Paris. Le Crédit foncier est, on le sait, autorisé par une loi à émettre les obligations dites communales pour faire des prêts aux communes qui ont la faculté d’emprunter. On avait cru jusqu’à présent en France que les communes n’avaient la faculté d’emprunter que lorsqu’elles y étaient autorisées par une loi. Les emprunts communaux autorisés l’an dernier par le corps législatif ne se sont pas élevés à plus de 30 millions ; on se demandait, en voyant les 290 millions émis depuis quinze mois par le Crédit foncier, à quelle commune placée au-dessus des lois il en avait pu faire l’avance. Le mystère n’existe plus aujourd’hui. On avoue que les 290 millions ont été employés à escompter les délégations de la ville de Paris, c’est-à-dire à payer les travaux effectués dans l’année, les délégations devant être remboursées avec les excédans présumés des recettes de la ville pendant une série de plusieurs années. Il y a eu de grands débats à la chambre, soutenus avec des argumens un peu puérils par les commissaires du gouvernement, sur la question de savoir s’il fallait donner ou non la qualification d’emprunts aux opérations financières qui permettent à la ville de dépenser au moins 290 millions en une année. Si ces opérations avaient le caractère d’un emprunt, la loi aurait été violée, car il n’y a point eu d’autorisation demandée à la chambre ; échappant à la nécessité de cette autorisation, si on leur retire la dénomination d’emprunts, ces opérations ne dépendent plus que de l’initiative du préfet : la décision n’en est soumise à aucune délibération publique, à aucune contradiction, à aucun contrôle de la part d’une assemblée représentant les contribuables. Il serait oiseux de discuter avec les organes de l’administration sur le droit qu’on a ou qu’on n’a pas de donner à l’escompte d’une délégation à échéance de six ans le nom d’emprunt, que l’administration admet elle-même pour une délégation à échéance de sept ans. Quel avantage les commissaires du gouvernement trouvent-ils à établir que, quand le ministre des finances ne peut pas ordonner une dépense d’un centime sans le contrôle de la représentation des contribuables, il y