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divorce de Henri VIII avec Catherine d’Aragon. Wolsey aurait voulu encore que les cardinaux s’assemblassent en France, pour se concerter dans ce grand trouble de l’église chrétienne, et se faire déléguer en quelque sorte l’exercice du pontificat comme vicaire-général du pape durant la captivité prolongée de Clément VII[1]; mais sa tentative fut infructueuse, et l’ambition qu’il avait d’être, même un moment, pape par délégation, se trouva déçue. Clément VII, qui avait treize cardinaux avec lui dans le château Saint-Ange, avait défendu aux autres de quitter l’Italie afin qu’ils fussent à portée de se former en conclave et de lui donner promptement un successeur, s’il était tué dans le château Saint-Ange ou s’il succombait à ses chagrins.

François Ier envoya bientôt en Angleterre le grand-maître Anne de Montmorency, qu’accompagnaient l’évêque de Bayonne, Jean du Bellay, Brinon, premier président du parlement de Rouen, d’Humières, gouverneur de Picardie, et une brillante suite de six cents gentilshommes, demander à Henri VIII l’exécution des traités, qu’il célébra lui-même avec la plus grande pompe dans la cathédrale d’Amiens. Plus unis que jamais, François Ier et Henri VIII se répandirent en démonstrations d’amitié, s’adressèrent d’agréables présens, et ils échangèrent entre eux avec une cordialité pompeuse le collier de Saint-Michel et l’ordre de la Jarretière. Tandis que se concluaient ces traités, qui devaient être suivis d’une solennelle déclaration de guerre de la part des deux rois à l’empereur, s’il n’acceptait pas leurs propositions de paix, François Ier adressa à Clément VII une lettre qu’il mit tout son esprit à rendre persuasive. Il conjura le pape captif de ne pas se soumettre aux volontés de Charles-Quint et de prendre en gré son infortune, qui tournerait à sa gloire et à la confusion de ses ennemis. Il l’assurait que Dieu ne laisserait pas impunis ceux qui avaient ainsi traité son vicaire et commis tant d’exécrables inhumanités dans la cité où les successeurs de saint Pierre avaient leur siège. « Nous vous prions, très saint père, le roi d’Angleterre et moi, lui disait-il, quelque chose que l’on vous propose ou menace, de ne condescendre à octroyer ou faire acte indécent à la dignité à laquelle vous estes constitué. » Il lui annonçait que le roi d’Angleterre et lui avaient déjà en Italie une forte armée et une flotte qui seraient employées à son service; que si leurs troupes rencontraient les ennemis, elles leur livreraient bataille et auraient sur eux la victoire. Il ajoutait : « Mon très cher frère le roi d’Angleterre et moi avons envoyé par devers l’empereur pour votre délivrance. Si nous ne pouvons l’obtenir par douceur,

  1. Lettre du 16 septembre 1527, écrite de Compiègne au pape Clément VII par les cinq cardinaux d’York, de Bourbon, de Lorraine, de Sens et Salviati. — Mss. de Brienne, vol. 5, n° 1, — et Legrand, Preuves de l’histoire du Divorce, t. III, pag. 4 à 13.