Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 68.djvu/289

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lloyd’s soit devenu le centre des assurances maritimes. De grandes compagnies très florissantes, appuyées sur de nombreux actionnaires, se rattachent elles-mêmes à ce tronc, dont les branches s’étendent sur toutes les entreprises de la navigation et protègent le commerce anglais contre les banqueroutes de l’océan.

Outre la salle des underwriters, l’établissement renferme des parties intéressantes. Autour d’une chambre revêtue de boiseries règne une galerie suspendue à laquelle on monte par un escalier, et dont les panneaux sont couverts de cartes marines fixées à des rouleaux mobiles et dressées avec un soin merveilleux. A côté, dans une autre chambre basse, est une bibliothèque d’atlas, dont plusieurs ont été offerts à l’association par les divers gouvernemens de l’Europe. L’un de ces gros volumes, magnifiquement reliés, est un ancien cadeau du roi Louis-Philippe : on me le montra comme un souvenir de mon pays. La salle de lecture, reading room, longue de quatre-vingts pieds, occupe, en face de l’entrée principale de Lloyd’s, une partie de l’aile septentrionale de la Bourse. Là figurent des liasses de journaux, de gazettes maritimes, de lettres de commerce classées par ordre de nations et de contrées. Voici l’Inde, la Chine, l’Australie, le Canada. Ces deux grandes tables circulaires, toutes chargées de papiers, représentent en effet les deux mondes avec leurs divisions politiques. Grâce à cet arrangement, le lecteur peut embrasser d’un coup d’œil l’état du commerce dans toutes les parties de la terre. Les innombrables fils du vaste réseau d’affaires qui couvrent les mers et les continens viennent ainsi se réunir en quelque sorte sous la main des habitués de Lloyd’s. Comment une telle institution, dont les dépenses s’élèvent à près de 10,000 livres sterling (250,000 fr.) par an, et qui ne prélève rien sur les gains de ses membres, peut-elle se soutenir? Pour répondre à cette question il suffira d’indiquer la principale source de ses revenus.

Lloyd’s vit surtout de souscriptions, et chacun des membres de l’association contribue, selon certaines règles, à la prospérité de l’établissement[1]. Les assureurs, qui supportent la plus lourde charge, sont en même temps ceux dont le caractère et la responsa-

  1. Ces membres se divisent en trois classes, 1° les assureurs (underwriting members), 2° les non-assureurs (non-underwriting members), 3° les souscripteurs annuels (annual subscribers). Les underwriters paient à leur entrée dans l’association une somme de 50 liv. sterl. (1,250 fr.), puis ensuite ils versent une souscription annuelle de 12 guinées (316 fr. 40 cent.), et de 5 guinées (132 fr.) pour chaque substitut ou commis qu’ils envoient à leur place dans l’établissement. Ceux qui n’assurent point (non-underwriting members), c’est-à-dire les courtiers (brokers), paient à leur entrée une somme de 25 livres sterling (625 fr.) : ils acquittent en outre par an une souscription de 4 guinées (105 fr. 30 cent.) pour eux-mêmes, et autant pour chaque commis qu’ils emploient. Les souscripteurs annuels ne sont tenus qu’à une cotisation de 5 guinées par tête.