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la flotte napolitaine, qui, assaillie de deux côtés, ne résista plus[1]. La défaite des Espagnols fut complète. Ils firent de grandes pertes : de leurs six galères, deux seulement parvinrent à s’échapper par la fuite; les quatre autres furent coulées ou prises, ainsi que la plupart de leurs brigantins et de leurs petits navires. Dans la ruine de la flotte furent enveloppés des chefs fort importans du royaume et de l’armée. Le vice-roi Ugo de Moncada et le grand-écuyer Cesare Ferramosca furent tués. Avec eux périrent quatre capitaines des vieilles troupes espagnoles et plusieurs centaines de leurs meilleurs arquebusiers. Tout ce qui échappa à la mort fut réduit en captivité. Le marquis del Guasto, le connétable du royaume Ascanio Colonna, le commandeur Icardo, frère du châtelain de Naples, des seigneurs ou italiens, ou flamands, ou espagnols, qui avaient voulu concourir à une entreprise au succès de laquelle semblait attachée la conservation de Naples, et parmi eux Filippo Cerviglione, Giovanni Gaetano, Camillo Colonna, Annibal di Gennaro, Vauri, Serone, tombèrent entre les mains de Philippino Doria, et restèrent ses prisonniers. A la suite de cette défaite, Naples ne put plus rien recevoir de la Sicile et des îles voisines. Le golfe, où les Français occupèrent d’un côté Castellamare, de l’autre Puozzolo, fut sévèrement gardé par la flotte génoise, à laquelle se réunit bientôt la flotte vénitienne après avoir pris les villes maritimes qui convenaient à l’ambitieuse république sur les côtes de la Pouille et de la Calabre.

Tandis que la mer cessait d’être ouverte, la terre était aussi fermée aux impériaux, acculés et affaiblis dans Naples. Trois jours après la bataille navale, l’armée française s’était établie devant la ville, que Lautrec ne songea point à prendre de vive force, espérant avant peu l’obliger à se rendre. La reddition de Naples, qui tenait seule encore avec Gaëte, où s’étaient enfermés les Colonna, devait compléter et affermir la conquête du royaume. Lautrec assit son camp sur les hauteurs qui font face à Naples et s’y retrancha. Vers un point culminant et un peu plus avancé, il plaça des bandes gasconnes et une bonne troupe italienne dans un petit camp d’avant-poste d’où les assiégés, encore plus tenus en bride, furent inquiétés de très près. Les canons des assiègeans battaient jusqu’aux portes de San-Gennaro et de Capoue. Enfin une large tranchée, destinée à s’étendre du grand camp à la mer, fut creusée par les soins industrieux du comte Pedro Navarro. Cet homme entreprenant, à qui était due l’invention des mines pour l’attaque des

  1. La bataille est racontée par Paul Jove, qui en tenait les détails de Philippino Doria. — Istorie del suo tempo, lib. 25.