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places, et qui excellait dans l’art des sièges, cherchait à compléter par là, le blocus de Naples, afin d’interdire toute communication aux impériaux avec l’intérieur du pays.

Sans être entièrement bloqués, les impériaux furent vivement pressés durant tout le mois de mai et la plus grande partie du mois de juin. Soumis à de dures privations et dénués de toute solde, ils se livrèrent à leurs violentes mutineries. Il fallut leur promettre, pour les apaiser, de leur compter prochainement trois paies. Le là juin 1528, après un mois et demi de siège, le prince d’Orange écrivit à Charles-Quint pour l’instruire du triste état où son armée était réduite dans Naples, et pour réclamer de lui une prompte assistance. « Il y a dix jours, lui disait-il, que nous sommes au pain et à l’eau; la chair, le vin et le payement pour tous vos gens est venu à faillir depuis longtemps[1]. » Le prince d’Orange avait cependant fait jurer aux lansquenets et aux Espagnols qu’ils souffriraient tout avant de capituler, et qu’ils défendraient Naples jusqu’à l’extrémité. En transmettant à l’empereur cette promesse de ses soldats, il ajoutait : « Sire, ni eux ni moy ne pourrions plus faire que le possible, et quand nous aurons passé ce mois, nous serons bien près du bout. » Il insistait plus que jamais pour que le duc de Brunswick, dont les troupes étaient arrivées en Lombardie, descendît dans le royaume de Naples, et pour que l’empereur envoyât au plus vite sur la flotte qu’il avait annoncée des renforts, des vivres et de l’argent. Il affirmait toutefois que le besoin d’être secouru ne le disposait pas le moins du monde à se rendre, « car, ajoutait-il, je vous assure que je n’aurai bu ni mangé de trois jours avant que je dise le mot. »

Afin d’éviter une aussi dure nécessité, ou tout au moins d’en retarder le moment, il essayait, à l’aide de sorties exécutées surtout pendant la nuit et fréquemment renouvelées, de faire entrer des subsistances dans la ville, qui en était de plus en plus dépourvue. A la tête de ces aventureuses expéditions était d’ordinaire le jeune Fernand de Gonzague, frère du marquis de Mantoue, qui devait être plus tard un des habiles généraux de Charles-Quint. Il commandait alors la cavalerie légère de l’année impériale. L’intrépide Juan de Urbina, mestre de camp de l’infanterie espagnole, sortait également avec les soldats les plus agiles et les plus déterminés de sa nation. Ils rapportaient l’un et l’autre quelques vivres de ces courses, quand elles n’avaient pas été découvertes ou qu’elles avaient été heureuses.

  1. Lettre du prince d’Orange à l’empereur, du 14 juin 1528, — Archives impériales et royales de Vienne, et dans Lanz, Correspondance de l’empereur Charles V, vol. Ier, p. 270.