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chapelle du palais pontifical. Deux jours après, le 24 février, anniversaire de sa naissance et de sa principale victoire, la couronne d’or du saint-empire romain fut placée sur sa tête avec une solennité plus éclatante encore dans l’église de San-Petronio par le souverain pontife, qui, malgré sa gratitude et son amitié, ne consacrait pas sans trouble un aussi grand pouvoir[1].

Ayant accompli ses desseins en Italie, l’heureux Charles-Quint alla tenter de les accomplir en Allemagne. Remontant la péninsule, il passa par les états vénitiens, où les clés des villes lui furent apportées avec une confiante déférence, et il se rendit à Inspruck. Son frère Ferdinand, roi de Bohême et de Hongrie, était venu l’y recevoir à la tête d’une partie de la noblesse du pays. Charles-Quint partit de là pour Augsbourg, et, neuf ans après avoir quitté l’Allemagne, il y reparut avec le désir d’en pacifier les dissensions religieuses, qui s’étaient accrues, d’en protéger les frontières orientales, que les Turcs avaient récemment envahies, et, devenu maintenant empereur couronné, d’y faire élire son frère Ferdinand roi des Romains, afin qu’il pût au besoin le remplacer avec plus d’autorité dans l’empire.

Si Charles-Quint recueillait ces grands avantages du traité de Cambrai, François Ier se soumettait avec peine aux conditions de la paix qu’il avait sollicitée et qu’il venait de conclure. Il protestait en secret[2] contre ce traité qu’il jurait en public[3], et il y faisait proposer des modifications qu’il était non moins imprudent de demander qu’impossible d’obtenir. L’amiral Chabot de Brion, qu’il avait envoyé en Italie pour recevoir la ratification et le serment de Charles-Quint, avait exprimé de sa part à l’empereur le désir de ne remettre que la moitié des 1,200,000 écus d’or qui devaient être comptés pour la délivrance du dauphin et du duc d’Orléans, en donnant des sûretés pour le paiement prochain des 600,000 autres.

  1. « Bien vous advise, écrivait à l’amiral Chabot de Brion Gabriel de Gramont évêque de Tarbes, qui assistait au couronnement, que le pape se essayoit de faire la plus joyeuse chère qu’il estoit possible en lui baillant l’espée et en lui mettant la couronne sur la teste, mais je croys qu’il ne feist en sa vie cérémonie qui lui touchast si près du cœur ny dont je pense il luy doive advenir moing de bien. Car aucunes foys qu’il pensoit qu’on ne le regardast, il faisoit de si grands soupirs, que pour pesante que fust la chappe, il la faisoit branler à bon escient. » — Lettre du 25 février 1530. — Mss. Béthune, vol. 8578, f° 43.
  2. Cette protestation est dans Dumont, Corps diplomatique, vol. IV, 2e partie, p. 52.
  3. Le 18 octobre, François Ier prêta en présence de Charles de Poupet, seigneur de La Chaux, et de Guillaume des Barres, dans l’église Notre-Dame de Paris, ce serment que Charles-Quint prêtait deux jours avant à Plaisance devant l’amiral Chabot et le secrétaire Bayart. — Lettre de Poupet de La Chaux et de Guillaume des Barres à l’empereur, du 21 octobre 1529. — Leglay, vol. II, p. 713 à 721.