Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 68.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Trois réformes d’un caractère particulièrement organique ont été accomplies sous le gouvernement actuel.

Le titre VI de la loi de 1831, relatif aux corps détachés de la garde nationale, a été formellement aboli par le décret du 11 janvier 1852[1], et le dispositif de ce dernier acte, qui n’était pas inspiré par le même esprit que les législations antérieures, n’indiquait aucune pensée de retour. Depuis seize ans, il n’existe en France aucun mode légal de convoquer et d’organiser la garde nationale mobile; les citoyens qui durant cette période ont satisfait à la loi du recrutement et qui ont aujourd’hui passé l’âge de vingt ans peuvent se croire dégagés des obligations que leur imposait la loi de 1831. On parle d’une combinaison nouvelle destinée à combler cette lacune constitutionnelle; sans doute elle sera marquée d’un caractère en quelque sorte rétroactif, car il s’agit de pourvoir aux besoins du présent au moins autant qu’à ceux de l’avenir. Toutes les mesures qui pourront être prises aujourd’hui au sujet du recrutement ou de la réserve n’auront leur plein effet que dans plusieurs années, et s’il est toujours permis de compter, en cas de péril, sur l’enthousiasme de la nation, l’expérience a prouvé qu’il était utile de pouvoir diriger ce mouvement et en compléter les résultats.

La garde impériale a été rétablie en 1854 avec des proportions, une organisation et même aujourd’hui quelques détails de costume qui rappellent la garde royale de Charles X. Nous avons indiqué le rôle que les corps d’élite ont rempli dans l’histoire de nos institutions de guerre, nous n’y reviendrons pas. On a souvent émis l’opinion que l’infanterie avait besoin d’une réserve de bataille, comme déjà la cavalerie avait la sienne dans les cuirassiers. Si cette lacune existait, ce qui n’est pas admis par tout le monde, peut-être aurait-on pu y pourvoir d’une façon moins dispendieuse et plus conforme à l’esprit qui a prévalu dans notre organisation civile et militaire. D’ailleurs, par une coïncidence singulière, dans la journée de Magenta, qui a procuré tant de gloire à la division de grenadiers et à ses chefs, ce n’est pas précisément comme réserve que cette belle et bonne troupe s’est trouvée engagée. La garde impériale est digne en tous points de tenir la droite de l’armée française, et nous sommes assuré que rien n’est négligé pour en éloigner l’esprit de privilège; mais il est difficile de l’exclure entièrement, et il se manifeste jusque dans certains détails de la vie des officiers et dans les conditions qui leur sont imposées. Rappelons encore que, dans la discussion si complète de 1832, à laquelle prenaient part ou assistaient quelques-uns des premiers généraux de la république,

  1. La loi du 13 juin 1851 sur la garde nationale annonçait une loi spéciale sur les corps détachés, mais maintenait implicitement le titre VI de la loi de 1831 jusqu’à promulgation d’une semblable mesure.