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LES
INSTITUTIONS MILITAIRES
DE LA FRANCE

LOUVOIS. — CARNOT. — SAINT-CYR.

Il y a environ cent ans, l’Europe apprit avec quelque surprise qu’elle comptait une grande puissance militaire de plus, et que cette puissance s’était d’emblée placée au premier rang. Ce n’était pas, comme au temps de Gustave-Adolphe, un brillant météore surgissant au milieu d’une confusion universelle pour disparaître bientôt, après avoir rempli le monde de son éclat; c’était la plus petite, la plus pauvre, la plus récente des monarchies qui battait successivement les armées les plus célèbres. Non-seulement elle remportait des victoires et savait en profiter, mais elle pouvait sans succomber perdre une ou plusieurs parties au terrible jeu de la guerre; elle pouvait supporter l’épreuve des revers, reprendre la lutte après les défaites et ramener la victoire sous ses drapeaux.

Au XVIIIe siècle, on cherchait librement la solution des problèmes les plus difficiles; un phénomène aussi remarquable ne pouvait se produire sans donner lieu aux commentaires les plus divers. A côté de ceux qui rendaient simplement hommage au génie, à la ténacité de Frédéric, ou qui saluaient en lui le philosophe couronné, il y eut des prôneurs pour tous les détails de l’organisation et de la tactique prussiennes : celui-ci vantait « l’ordre oblique, » cet autre le « fusil à baguette de fer; » enfin de profonds esprits jugeaient que, si