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théologie du XVIIe siècle, au Prayer-book et aux articles, les autres, comme M. Newmann, inclinaient visiblement vers le romanisme. Déjà même sous la plume de ce dernier se montrait en germe la théorie ultramontaine du développement continu et de la progression constante des doctrines catholiques. Il était donc à craindre que ces efforts isolés n’allassent se briser contre la résistance de tout le protestantisme alarmé ; l’association était menacée d’impuissance. Il lui fallait un chef. Ce chef se présenta enfin, ce fut le docteur Pusey.

Nul plus que M. Pusey ne commandait le respect par sa science et la pureté de sa vie. Professeur d’hébreu et chanoine de Christ-church, il passait pour l’une des lumières de l’université d’Oxford. « Devant lui, nous étions tous frappés d’admiration, dit M. Newmann ; nous ne l’appelions que le Grand. » C’était une importante acquisition. Autour de lui se rangèrent les membres du mouvement, les tractariens, comme les appelaient déjà leurs adversaires en forme d’injure. Le génie habile du docteur Pusey eut vite compris quelle était la cause de la faiblesse de ses amis. Puisque l’on tentait « une réforme de la réforme, » il fallait nettement savoir ce que l’on voulait. Avant de défendre les dogmes attaqués, on devait s’entendre sur l’existence même de ces dogmes. Le professeur de Christ-church se jeta hardiment alors dans la lutte. Durant plusieurs années, on l’entendit du haut de la chaire prendre la défense des sacremens et s’efforcer de réfuter les attaques séculaires du protestantisme. Ses premiers soins s’appliquèrent à réformer la pratique du baptême. « Gage de la régénération, disait-il avec les docteurs catholiques, le baptême nous imprime le caractère chrétien ; il nous fortifie, il nous fait à jamais enfans de Dieu. » Couronnée d’un plein succès, cette première tentative remit en honneur la doctrine oubliée de la régénération baptismale, et fut bientôt adoptée comme règle primordiale dans la petite église ; mais là ne se borna point le zèle de l’éminent professeur. S’attachant à celui des dogmes chrétiens le plus contesté par ses adversaires, la transsubstantiation, M. Pusey résolut, au nom des siens, de l’affirmer solennellement.

Au jour indiqué, alors qu’une cérémonie publique réunissait l’université d’Oxford à Christ-church, le savant docteur monta en chaire et prononça un sermon devenu fameux. Examinant la question des sacremens, l’auteur s’arrêtait sur le sacrifice eucharistique et le dogme de la transsubstantiation. Il déclarait que l’église chrétienne et catholique avait toujours reconnu à la transsubstantiation un caractère réel et objectif ; mais il s’efforçait de corriger par un tempérament l’absolu de cette doctrine. « Quand la réforme, disait-il, condamnait ce dogme comme erreur du moyen âge, la réforme se trompait, car on le retrouve dès la plus haute antiquité lié aux