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pour une population presque entièrement agricole, telle que celle du Périgord[1].

Le métayage touche d’ailleurs par plus d’un côté à des questions fort controversées et fort importantes ; il s’applique dans le département de la Dordogne, l’un des plus vastes de la France (918,256 hectares), aux neuf dixièmes des terres. Il s’en faut de beaucoup, comme on le sait, que la question soit chez nous particulière au Périgord. La région du sud-ouest, dont la Dordogne n’est qu’un fragment, a été justement nommée par M. de Lavergne la terre classique du métayage. Si l’on considère en outre qu’il est adopté dans la plupart de nos départemens du centre, sur certains points de ceux de l’ouest et çà et là dans des départemens isolés, on ne s’avance pas trop en affirmant que ce même régime intéresse un tiers environ du territoire national[2]. Autant de raisons pour s’en préoccuper partout ; mais dans le Périgord on ne le rencontre pas seulement sous une forme très compacte et à peu près exclusive, on le trouve encore presque à l’état primitif. Tandis qu’il est en voie de transformation partielle plus ou moins lente, quoique incontestable, dans l’ouest depuis une trentaine et dans le centre depuis une vingtaine d’années, c’est d’hier seulement qu’on a songé, dans la région qui nous occupe, à mettre en relief quelques essais d’amélioration, en vue de stimuler et de soutenir dans la carrière des réformes les initiatives individuelles.

Après avoir échappé en tout lieu et durant des siècles à toute discussion et par suite à toute lumière, la vieille méthode du métayage est sortie depuis quelques années des ombres et du silence qui l’enveloppaient. On le doit sans doute à l’esprit général de notre temps ; mais on le doit aussi à la louable intervention de quelques sociétés d’agriculture, celles de l’Allier, du Berri, des Landes. A Périgueux même, lors du concours régional en 1864, une section spéciale affectée aux produits des métairies avait obtenu soixante et onze médailles d’or, d’argent ou de bronze. Ajoutons que, sur les cent soixante et une questions posées dans le programme de l’enquête officielle récemment accomplie, il en est deux qui concernent le métayage. Il y a là une nouvelle preuve du mouvement

  1. Sur 502,673 habitans, d’après le recensement de 1866, la Dordogne n’en compte pas moins de 376,000 appartenant aux familles agricoles.
  2. Le métayage s’applique à la culture de 11 millions d’hectares pour toute la France. Or, si des 54 millions d’hectares qui composent notre territoire (la Corse comprise) on retranche les landes et bruyères, les bois et forêts, le lit des fleuves, le sable des rivages de la mer, le soi des villes., des routes, etc., il ne reste plus qu’environ 35 millions. d’hectares livrés à la culture. — Hors de France, le métayage embrasse plus de la moitié de l’Europe, en laissant de côté la Russie.