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Beaucoup d’établissemens de ce genre figurent dans les cadres de l’exposition, et ce n’est pas la partie la moins intéressante. L’influence qu’exerce le marché de Paris sur les industries de nos provinces est connu ; ce qui l’est moins, c’est le rôle que jouent ses propres industries dans le mouvement général de la production. Si c’est de Paris que partent les ordres, les inspirations, les modèles, c’est à Paris également que les produits viennent aboutir et quelquefois s’achever. Il y a dans la région suburbaine toute une zone manufacturière qui de l’ouest gagne le nord et part de Suresnes pour aboutir à Belleville. Plusieurs de ces hautes cheminées dont l’ombre se projette sur les champs et les vignobles sont les jalons de puissantes usines où, la vapeur aidant, des étoffes venues de nos départemens sont teintes, imprimées, apprêtées, reçoivent en un mot les dernières façons. Ailleurs on travaille le fer, on raffine le sucre, on découpe le bois, on prépare avec une perfection sans égale les produits si délicats de la chimie. On ne fait guère dans ces ateliers que ce qui ne se ferait pas en province avec le même degré de raffinement : dans la plupart des cas, on se contente d’amener ce qui est dégrossi à une perfection plus grande. La cherté du salaire interdit la production courante, et ne permet guère que des travaux d’exception ; mais, pour ces travaux, il y a du moins des laboratoires où des ouvriers de choix travaillent sous les yeux des maîtres de la science, et où nos départemens peuvent puiser des inspirations. Paris fait plus, il s’identifie à eux tantôt par des exploitations directes, tantôt par des commandites. Rien ne se passe d’essentiel qu’il ne soit consulté, et il est peu de succès à espérer hors de ce qu’il approuve. C’est un arbitre, un juge, quelquefois un maître ; mais en même temps qu’il revendique les honneurs du pouvoir, il n’en répudie pas les charges. Son génie est au service. de qui en a besoin. Il invente, imagine, modifie sans relâche, contient le goût dans ses écarts et met de l’art dans ce qui en paraissait le moins susceptible. Voilà le Paris de l’exposition, et après en avoir esquissé la grande figure, il nous faudra pénétrer plus avant dans les secrets de son activité.

Il y aura aussi à étudier les lots fournis par nos provinces et par les grands états de l’Europe. Le titre particulier de cette exposition et assurément le plus rare, c’est que, dans les industries qui dominent et alimentent les autres, peu de grandes maisons auront manqué au rendez-vous qui leur était assigné. Le catalogue renferme presque tous les noms importans dont la manufacture s’honore. Pour divers motifs, plusieurs d’entre eux s’abstenaient naguère. Ceux qui avaient une réputation acquise et un travail assuré ne se résignaient pas à se laisser discuter, ni à